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Phantom
Pharewell.
Les adieux aux F-4F allemands
Christophe Duponchelle - Serge Nemry - Michel Pourbaix
Avril 2014
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Avant d’entamer une nouvelle saison aéronautique qui
s’annonce passionnante, nous revenons sur un événement majeur
qui s’est
déroulé en 2013 : le Phantom Pharewell .Organisé
le 29 juin sur la base du JG71 ‘Richthofen’ à Wittmund
(République Fédérale d’ Allemagne), cet adieu aux Phantom F-4F a
rassemblé plus de 130.000 personnes venues de toute l’Europe et de bien
plus loin. Une dernière et belle opportunité pour tous d’admirer au sol
et en vol, et de ‘’caresser’’ une dernière fois les Phantom II qui ont
équipé les unités de ‘’chasse’’ de la Luftwaffe. La veille déjà, plus
de 3.500 spotters avaient eu la chance d’assister aux
répétitions de cette manifestation et à l’arrivée des participants.
Le premier F-4F allemand, codé 37-01, quitte l’usine de Mc
Donnell Douglas (Saint-Louis, Missouri) fin 1972. Quelques mois plus
tard, les premiers appareils arrivent en Basse-Saxe et remplacent peu à
peu les TF/F-104G Starfighter de la Luftwaffe. Le F-4F est une version
simplifiée du F-4E en service au sein de l’US.Air Force. Quatre
escadres sont dotées du nouvel avion, les JG 71 et
JG 74 ainsi que les Jabog 35 et Jabog 36. Au total, ce sont 175
appareils de type F qui vont armer la Force Aérienne allemande
(Mc Donnell Douglas assemblera au total 5.195 Phantom dans différentes
versions)
Ce samedi 29 juin, alors que le ciel vide toutes ses larmes,
l’heure des adieux a sonné pour les derniers F-4F encore opérationnel à
Wittmund. L’organisation du Phantom Pharewell -volontairement
orthographié avec un Ph au lieu du F…, clin d’œil des organisateurs- a,
pour l’occasion, vu la mise en œuvre d’un «Héritage Flight»
ou «escadrille du souvenir» qui se compose de quatre F-4F.
Chaque appareil a reçu pour l’occasion, une livrée différente rappelant
l’évolution des schémas de camouflages portés au cours des quarante
années qu’a duré son utilisation opérationnelle.
Les Phantom retenus sont respectivement :
- le
38-10
qui totalise 6.900 heures de vol et porte un camouflage fait de deux
tons de vert (RAL 6014) et d’un gris (RAL 9012) appliqués sur les
surfaces supérieures (extrados). Ce schéma est appelé le « Norm 72 »et
représente le camouflage standard des F-4F à l’époque de la mise en
service.
- Le
38-33
(6.500 heures de vol) Dans le milieu des années 70 les pilotes de
chasse remettent en cause l’efficacité du « Norm 72 » : les
grandes zones vert/ olive et grises disposées géométriquement sont
certes idéales pour camoufler un avion au sol ou lorsqu’il évolue à
basse altitude, mais, sont totalement inadaptées dans le contexte de
combats aériens à haute altitude .L’avion devient une grosse tache
sombre sur fond de ciel clair. A cela il faut ajouter la ‘’haute
visibilité’’ des croix de fer et des marquages peints en
noirs et liserés de blancs. De plus, ils sont surdimensionnés et
l’ensemble fait de l’avion une cible des plus facile à repérer. Le
commandement de la Luftwaffe, après une étude menée avec les pilotes
des Jagdgeschwader 71 ‘’Richtofen’’ et 74 ‘’Mölders’’, les
‘’chasseurs’’ attitrés, adopte un nouveau style de camouflage, le norm
(ou standard) 81.Celui ci voit la tonalité de vert fortement diminuée
tandis que les gris sont accentués (RAL 7030-7035) Le dessin est
également plus arrondi. Le Norm 81 est appliqué sur les F-4F lors de la
phase de modernisation ‘’Peace Rhine’’. Photos 4-5
-Les
37-22
et
38-28
avec 6.500 et 6.700 heures aux compteurs montrent le « Norm 90J »,
nouveau concept au dessin plus stylisé. Il est mis en œuvre durant la
modernisation de 110 appareils au niveau F-4F’’ICE’’.
- Le
37-01,
totalise 7400 heures de vol. A l’occasion de cet adieu, l’avion a été
repeint dans les ateliers de Jever où il a reçu une livrée
commémorative spéciale dédiée au « Phantom Pharewell ».Habillé de bleu
et or, il effectue une superbe démonstration dans le ciel de Wittmund,
il est le dernier de la formation à se poser. Premier F-4F à doter la
Luftwaffe, il devient symboliquement le dernier Phantom allemand à se
poser sur cette piste qui en a vu des décollages et atterrissages de
F-4. Le 37-01 va, au grand bonheur des passionnés, être mis en
condition de préservation et placé comme ‘’Gate guardian’’ à l’entrée
de la base, il sera la mémoire de quatre décennie d’histoire de la base
Malgré un temps exécrable, surtout en matinée, la foule est
présente en masse, montrant ainsi son attachement envers cet avion
légendaire. Il plane sur la base un étrange sentiment, mélange de joie
et de tristesse. En effet, quel plaisir de pouvoir approcher une
dernière fois et immortaliser ces Phantom qui ont marqué l’histoire de
l’aviation; mais c’est un plaisir gâché en sachant que la quasi
totalité de ces avions va être démantibulée et ferraillée dans les
semaines qui vont suivre.
Une importante exposition statique permet de découvrir de
nombreux avions de la Luftwaffe parmi lesquels un autre Phantom (38-13)
qui arbore une déco particulièrement remarquée, combinant un fond noir
(couleur du deuil) et un damier orange/noir (couleur portées par des
avions de test). L’avion appartient au Wehrtechnische Dienstelle de
Manching, il a servi durant la phase de mise au point du programme ICE,
(Improved Combat Efficiency) aux USA. Le 38-13 a effectué son dernier
vol un mois après le Pharewell. Sur le fuselage, une inscription sans
équivoque : « Don’t let me die – I want to fly ! », ce qui
donne en français : Ne me laissez pas mourir - Je veux voler ! Un crédo
appuyé par les équipages présents et approuvé par tous les fans, même
les plus jeunes.
De nombreuses forces aériennes alliées se sont associées à
l’événement et ont délégués un ou plusieurs appareils sur place. Coté
belge la ‘’349’’, escadrille de chasse et l’OCU, unité de conversion
sur F-16, toutes deux basées à Kleine-Brogel, sont présentes avec deux
avions décorés. (FA-110 'GE-X' et FB-24) auquel s’ajoute le FA-80 dans
une hangarette. Quelques pilotes de la ‘’three four nine’’
(349), escadrille où le bleu domine, ont sympathiquement posé
pour notre objectif auprès d’une superbe (ancienne) Mercédès 190S
cabriolet de couleur …..rouge ! Un groupe de collectionneurs de
voitures anciennes était d’ailleurs présent ce jour avec de très beaux
véhicules qui, nous le verrons plus loin, vont être utilisés a bon
escient.
Toujours au statique, un F-18A espagnol (C15-34 '12-50'), un
Tornado ECR 46-57, deux EF-2000 TYPHOON (S 3073 et S 3029).
Egalement présent sur le tarmac Tornado, Hawk, A4 Skyhawk, Airbus, P-3
Orion,... Au total ce sont une quarantaine d’avions qui sont exposés.
photos 35-45
Une visite des hangars où s’opéraient les maintenances des
F-4F permet de découvrir les différentes possibilités de systèmes
d’armes propres au Phantom II. Des moteurs dont celui de l’Eurofighter
et bien évidemment du Phantom sont également présentés…impressionnant.
Du matériel de survie, des casques, des mannequins en tenue de vol, des
sièges éjectables et des échoppes souvenirs sont également visibles.
Un peu plus loin, dans un autre bâtiment, rencontre avec
l’histoire de la Luftwaffe, représentée par RF-104G
Starfighter (24-85), un Canadair CL-13B Sabre et un
Messerschmitt Bf-109G-6
Malgré un
plafond nuageux assez bas et un vent fort, deux biplans et un Yak52
effectuent quelques passages.
A ce moment l’incertitude règne encore quand à la
présentation en vol des F-4, le plan de vol a déjà été retardé une
première fois et les infos données sur place sont contradictoires. Tout
à coup le vent se calme et de ‘’belles trouées ‘laissent apparaitre un
peu de ciel bleu. Au loin on entend la mise en route d’un réacteur qui
s’avère être le P&W J-52 d’un A-4N de EIS Aircraft GmbH,
une division de British Aérospace.Les sourires reviennent sur
les visages transis de froid…quand le Skyhawk se lance sur la piste et
libère les 3 tonnes de poussée de son moteur.
Une présentation solo est alors engagée et l’A-4N
(ex US NAVY) effectue quelques passages rapides puis à basse
vitesse, train d’atterrissage sorti. Cet avion est habituellement
utilisé comme plastron pour les Phantom et EF 2000, ou comme avion de
test, il rare de voir voler ce bel oiseau blanc lors de manifestations
aériennes publiques. Malheureusement, ses évolutions sont écourtées
suite à un problème technique, il semble que les aérofreins restent
bloqués en position ouverte. L’alerte est lancée au sol et entraine la
mise en place d’une procédure d’urgence, avec déploiement de plusieurs
véhicules des pompiers, des véhicules d’interventions techniques et des
services de secours. Rapidement, ils se positionnent en début de piste
et sont prêts à intervenir. Ce n’est pas du show… Nous assistons,
inquiets, à l’approche puis à l’atterrissage du A-4N qui, crosse
d’appontage sortie, accroche le brin d’arrêt. L’avion pique du nez et
le freinage est brutal pour le pilote, qui met quelques instants à
reprendre ses esprits. Après quelques vérifications et le désengagement
du câble d’arrêt l’avion est taxié jusqu’à son parking où il subira une
inspection plus approfondie.
En fin d’après midi, le ciel laisse enfin passer quelques
rayons de soleil, juste à temps pour illuminer le décollage
et le passage en formation des quatre Phantom du ‘’Héritage Flight’’.
Ils sont rejoints par deux Eurofighter du JAG31 « Boelcke
».La nouvelle formation symbolise la relève des F-4F par les
Eurofighter.
Après l’atterrissage des Typhon, les pilotes des
Phantom se sont littéralement ‘lâchés !’, effectuant pour notre plus
grand bonheur, passages à basse altitude, touch and go puis de nouveaux
passages au ‘’ras des pâquerettes’’ ! Dans le ciel, les trainées de
fumée noire typique aux réacteurs J-79 des Phantom marquent les
évolutions. Le public est ravi, n’hésite pas à crier sa joie et salue
intensivement les pilotes.
Après l’atterrissage des quatre avions dont le 37-01, qui est
rappelons le, le premier Phantom mis en service au sein de la Luftwaffe
et le dernier à atterrir à Wittmund, les F-4F passent au ralenti devant
la foule.
Les appareils rejoignent la zone officielle, où les équipages
sont accueillis par les autorités. Tour à tour pilotes et mécanos vont
se
jucher sur le dos du 38-01 et entament de grandes
‘holàs’’. Après les congratulations d’usages, ils rejoignent le parking
où les attendent de belles voitures anciennes. Le leader, l’Oberst
Gerhard Roubal, Commandant du ‘’Richtofen’’ prend place dans la Carman
Ghia marquées des logos de l’évènement tandis que le n°2 s’installe
laborieusement dans une originale et très petite BMW Isetta
familièrement surnommée ‘’das rollende ei’’ littéralement ‘’l’œuf
roulant !’’(En France c’est ‘’le pot de yaourt’’).
Les F-4F de la Luftwaffe ont, durant leur vie opérationnelle (40 ans),
assuré 279.000heures de vol.
En quittant les lieux, nous observons
de drôles d’œuvres d’arts, implantées parallèlement à la piste.
Renseignements pris auprès d’anciens de la Force Aérienne belge, qui se
sont souvent ‘’frottés’’ aux chasseurs de Wittmund, il s’agit de
réflecteurs d’ondes radar qui facilitaient la localisation de la piste
par mauvais temps.
Mettant un point final à la partie officielle l’Eurocopter
Cougar AS532 ‘’bleu et blanc’’ quitte la base emportant quelques VIP.