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NH-90 Caïman,
le nouveau 'cheval de
trait' pour la Composante Air belge.
Benoît Denet -
Décembre 2016
C'est le 2 octobre 2013 sur la base de
Beauvechain, située au Sud Est de Bruxelles que débarquait le premier
hélicoptère NH-90 TTH (Tactical Transport Helicopter) belge. La
Belgique opère un total de huit NH-90, quatre en version TTH depuis la
base de Beauvechain et quatre en version NFH (NATO Frigate Helicopter)
au départ de la base côtière de Koksijde.
La version NFH belge joue le rôle de search & rescue
en mer mais également celui de secours sur terre, en remplacement des
vénérables Westland Sea King. Une autre mission importante est le Sea
Warfare ou la guerre en mer. Pour cette tâche de recherche sous-marine
et aérienne en avant d'une flottille, deux machines sont spécialement
dédiées. Mis à part le gros radôme sous son nez, la version NFH se
différencie de la version TTH surtout par des systèmes embarqués et des
softwares différents.
Aujourd'hui, nous allons essentiellement nous
intéresser à la version TTH et à sa mission de transport tactique.
Voici comment ce qu'en dit le Commandant Hardenne, pilote instructeur
sur Caiman: "
Nous
pouvons transporter des charges ou un véhicule sous élingue ou des
soldats en utilisant nos portes d'accès ou encore déposer des Forces
Spéciales avec les cordes (Fast Roping) pour une action rapide. Le
travail avec un treuil fait aussi partie de notre programme".
D'un point de vue opérationnel, trois niveaux sont définis :
-1 Initial Operational Capable (IOC)
-2 Limited Operational Capable (LOC)
-3 Full Opérational Capable (FOC)
Ces trois niveaux dépendent de l'environnement. En effet,
l'escadrille est à même d'effectuer toutes les tâches opérationnelles
dans un environnement non hostile comme au-dessus de la Belgique, et
pour autant ne pas l'être au vu des menaces sol-air (par exemple
au-dessus d'un pays en guerre). Pour cette raison, les machines devront
être équipées, testées et entraînées aux contre-mesures électroniques.
C'est clairement une capacité du LOC comme toute une série d'autres
opérations.
La 18ième Escadrille qui opère ces quatre NH-90
TTH, a été rendue IOC le 20 mai 2015 et est aujourd'hui en phase de
LOC. En ce mois de septembre a débuté une nouvelle capacité du LOC avec
l'installation et les tests de mitrailleuses Point 50. Pour être FOC,
il faudra pouvoir déployer deux machines pendant six mois dans un pays
africain. Cela impliquera entre autres de remplir la capacité de
maintenance et opérationnelle loin de la base mais aussi de tester, par
exemple, le transport par avion-cargo Antonov 124 ou autre.
Le processus LOC est déjà bien avancé puisque les évaluations et la
configuration des "chaff & flare" ont déjà été faites. Les
pilotes espèrent être complètement LOC en mars 2017 et être FOC vers la
fin 2017.
Généralement, l'équipage se compose de
deux pilotes et un "Cabin Operator", parfois assisté par un second. La
formation du Cabin Operator est proche de celle d'un mécano NH-90 avec
en plus un cursus de weight & balance car c'est lui qui signera
la loadsheet. La feuille de performance sera signée par le Commandant
de bord. Le Cabin Operator joue un rôle essentiel dans la gestion de ce
qui se passe en cabine, mais aussi en ce qui concerne le travail au
treuil, la gestion de la charge, des fast roping. Si nécessaire, il
sera aussi en charge" d'une des deux mitrailleuses. L'autre étant dans
ce cas de figure opérée par un assistant Cabin Operator. Il lui faudra
un bon nombre de vols couvrant toutes les niches des missions du
Caiman, avant d'être lâché. Bien entendu, la formation à
l'hélitreuillage est une des plus difficiles.
Quant aux pilotes, ils sont formés au
départ comme tout pilote de Composante Air belge, avec un ATLPA pendant
un an. Ensuite vient la formation sur avion école SIAI-
Marchetti SF-260 puis sur l'avion à réaction Alpha Jet. Après
cet apprentissage de base, ils seront orientés soit vers les avions de
combat (F-16), de transport ou encore sur hélicoptères. Pour ces
derniers, ils seront initiés aux vols depuis Dax en France sur des
EC-120 Colibri. Ensuite, ils reviendront à Beauvechain pour passer sur
Agusta A-109. Actuellement, ils restent quelques années sur A-109 avant
de passer sur NH-90, mais dans le futur, on pourrait imaginer un
passage direct sur Caiman. Le pilote arrivant à la 18 Escadrille
partira ensuite à Hanovre en Allemagne pour un cours théorique et 50
heures de simulateur. Après ces trois mois, c'est un retour à
Beauvechain pour débuter les vols sur NH-90 et toute la phase
opérationnelle qui s'ensuit.
Un passage vers une formation, en France est à l'étude pour 2017.
Revenons aux qualités de vol du NH-90
avec le Commandant Hardenne, voici ce qu'il peut nous en dire : "
C'est la meilleure machine sur
laquelle j'ai volé. Je ne renie certainement pas l'Alouette II, ni
l'Agusta A-109 sur lequel j'ai volé pendant 18 ans. Au niveau
puissance, c'est démesuré et en avionique, c'est une excellente
machine. Le plaisir des commandes de vol avec le" fly by wire" est au
rendez-vous. Sur le plan de la visibilité, c'est moins bon que dans
l'Alouette qui me donnait l'impression d'avoir une vue panoramique
alors que le Caiman peut se comparer à un cockpit d'Airbus A320.
L'A-109 avait cette faculté de ne pratiquement pas vibrer, il était
petit et agile. Il faut bien se rendre compte qu'avec
un rotor un peu plus grand que l'A-109, le Caiman peut soulever une
masse de 11 tonnes tout en restant très agile. En fait, chacune de ces
trois machines avaient des avantages mais le NH-90 en accumule
beaucoup. Pour le vol en montagne, je me rends compte que je peux
effectuer les mêmes points de posé qu'avec l'A-109 précédemment. C'est
d'ailleurs une notion qu'il faut bien apprendre aux stagiaires. En
effet, avec quatre ou cinq heures sur NH, on voit qu'il vole comme un
Agusta et je leur dis toujours de regarder à l'arrière pour voir la
taille de la cabine. C'est un bus volant avec ses 16 mètres de long. A
travers cela, l'élève doit bien assimiler cette notion d'énergie
cinétique que l'on a avec cet hélicoptère. Selon moi, c'est le sommet
du pilotage que de sentir l'énergie cinétique de l'engin. Si je veux
voler comme en A-109 en montagne et commencer à freiner au même point
de repère, c'est fini ! ".
A propos de la montagne, s'y entraîne-t-on beaucoup avec la Composante
Air belge ?
"
En réalité, je dis
toujours que l'on est toléré en montagne, mais nous ne sommes pas des
pilotes de montagne comme peuvent l'être les suisses ou les autrichiens
qui sont confrontés tous les jours à ces conditions particulières. Nous
effectuons ce que l'on appelle des stages de perte de puissance pendant
lesquels on va aborder les fautes d'appréciation et l'aérologie qui
peuvent se payer cash en montagne".
Et les qualités de vol de la machine, comment se
comporte-t-elle si on la pousse un peu ? "
C'est une machine saine et
agile. On n'a pas de limitation de G dans le pilotage. Si je vais trop
loin, il va commencer à vibrer m'indiquant qu'il est temps que je lâche
la main. Si je rentre l'hélico en G négatif, l'ordinateur de bord va
s'en rendre compte et il va subir le -1 ou - 2 G mais il ne va pas
m'empêcher. On a bien entendu des limitations, si je déplace mes 10,6
tonnes, j'aurai des limites en virage ou autres.
Pour les vols tactiques, l'autopilote est très performant. Pour le
travail avec élingue, on préférera le faire en manuel car c'est plus
confortable, il va maintenir la position mais c'est souvent une
question d'un mètre voir moins". Et pourrait-on imaginer
de faire un vol de nuit à très basse altitude comme par exemple pour
aller déposer des forces spéciales ? "
On ne sait pas faire de 'terrain
following', on n'a pas de 'terrain avoidance' avec un radar de suivi de
terrain. Par contre, on pourrait imaginer moyennant un autre software,
voler comme un Caracal français qui est capable de refaire le trajet
aller qu'il vient de faire, en sens inverse à la perfection à très
basse altitude".
D'un point de vue mécanique, comment le
Caiman aborde-t-il les conditions difficiles ? "
Nous avons un très bon retour de
la part des Italiens sur le théâtre afghan ou encore de Français au
Mali où le filtre à poussière semble très bien fonctionner. A ce
propos, je suis toujours étonné de la qualité de la mécanique de cette
machine, c'est du très haut niveau. Les moteurs sont démesurés, je peux
perdre un moteur et continuer mon vol. Cela rend le vol très agréable.
J'attends encore les nouveaux casques qui nous permettront d'avoir un
référencement dans le casque avec le système FLIR. Le FLIR est déjà
installé mais n'est pas encore connecté sur nos machines, c'est sans
nul doute la prochaine évolution".
A l'heure actuelle, la 18iéme Escadrille
accueille 15 pilotes qualifiés et le seizième est proche de l'être. Un
déploiement opérationnel est prévu en Lituanie dans les semaines à
venir car la situation semble se dégrader en mer Baltique. Des
exercices belgo-belges avec d'autres machines sont aussi au programme
pour avaliser l'aspect opérationnel aux standards OTAN ainsi que des
exercices à l'étranger avec des hélicoptères de diverses forces
aériennes. Un important exercice international 'Black Blades' est aussi
au planifié au mois de décembre, depuis la base de Florennes, avec les
forces spéciales et des machines venues d'un peu partout en Europe.
La conclusion revient au Commandant Hardenne : "
Dans ma carrière, devenir
instructeur sur NH-90 est sans nul doute le top ! Si j'avais encore
voulu voler sur d'autres machines ? Peut-être sur V-22 Osprey pour voir
ce que cela donne…".
Caractéristiques techniques : (Sources EADS – NHIndustries)
Dimensions extérieures :
Encombrement (rotors tournant) :
Longueur |
19,56 m |
64,18 ft |
Largeur |
16.30 m |
53,48 ft |
Hauteur |
5,3 m |
17.42 ft |
Poids :
Poids brut maximum | 10.600
kg | 23,369 lb |
Poids brut Alternate | 11.000
kg | 24,250 lb |
Poids à vide | 6.400
kg | 14.109 lb |
Charge utile | 4.200
kg | 9,260 lb |
Capacité de chargement :
Cargo Crochet | 4.000
kg | 8,818 lb |
Simple ou double Rescue Hoist | 270
kg | 595 lb |
Hoist de sauvetage sur un terrain | 400
kg | 880 lb |
Performances générales :
Vitesse de croisière maximale
(*) | 300 kmh |
Taux maximal de montée
(*) | 11,2 m / sec |
Endurance
maximale | 5 h |
Range maxi avec 2500 kg de
charge | 900 km |
(*) a 10 000 kg
Pays ayant commandés le NH-90 (515 appareils) :
- Les Pays Bas
- La Belgique
- L'Allemagne
- La France
- L'Italie
- L'Espagne
- La Grèce
- La Norvège
- La Finlande
- La Suède
- Le Sultanat d'Oman
- L'Australie
- La Nouvelle Zélande
La 300eme machine a été livrée le 15 décembre (à la force
aéromobile de l'armée de Terre espagnole (FAMET)) et plus de 120.000
heures
de vol effectuées.
L'auteur tient à remercier le département IPR de la Composante Air belge.