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Solo Display F-16 & Blériot XI

100 Ans d’Aviation au travers de deux avions mythiques

Serge Nemry – Octobre 2014


 Samedi, l’Airshow débute timidement, sous une brume tenace et une température assez basse, il en sera de même le lendemain, dimanche. Nous évoquons les deux journées de ce grand show aérien dans nos articles : Belgian Air Force Days. Mais samedi, un moment plus important que tout a retenu l’attention du public et des photographes. Vers 15h30, alors que le ciel est bien dégagé, le public assiste à un spectacle inoubliable offert par le Commandant Aviateur Renaud ‘’Grat’’ Thys qui, aux commandes de son F-16, rejoint dans le ciel de KB un Blériot XI piloté par le suédois Mikael Carlson. Une manœuvre extrêmement délicate et contraignante pour Grat qui doit prendre en considération un nombre important de paramètres variables. Le Commandant Renaud ‘’Grat’’ Thys nous explique :

Comment  ce projet est-il né ? Tout commence par une idée du Colonel Aviateur Paul Desair, BaseCO de Kleine-Brogel, émise lors de l’European Air Show Council. Là-bas nous avons rencontré Mikael Carlson, propriétaire, pilote et génial restaurateur d’avions anciens, basé en Suède. L’idée est de faire voler le Blériot, avion emblématique des débuts de l’aviation, avec le F-16, l’avion de chasse par excellence…Et donc nous voilà partis et l’idée fait son chemin… si bien qu’à KB, on me demande d’aller voir Mikael, en plein réassemblage de ses avions (il les transporte dans des remorques et les monte sur place). On discute, je lui donne un coup de main et on se met d’accord sur un plan de vol.
Quelles sont les principales difficultés ? Les difficultés sont multiples : le Blériot ne vole qu’à 40 km/h, ne vole pas au-dessus de 100 ft pour des raisons de sécurité (en cas de panne, l’avion tombe comme une brique et le pilote n’a pas de parachute), n’a pas de radio et est (très) difficile à repérer en visuel. De plus, nous devons voler sur des axes de présentation différents (lui sur la ligne « avions lents » et moi sur l’axe principal).
Donc, un vol exigeant ? Le plan qui se dégage est le suivant : il volera devant la tribune VIP en restant entre 2 repères au sol (Il faut savoir qu’en plus on prévoit pas mal de vent) et fera demi-tour vers moi (qui passe 80m plus loin). A moi de minuter mon passage pour arriver parallèlement à  lui à 300 ft à vitesse mini (105 Kts) et de profiter de la parallaxe pour donner l’illusion que nous volons côte à côte. Problème encore: je ne peux pas faire demi-tour trop tôt au risque de le faire se retourner si je lui envoie un grand coup de postcombustion dans la figure. Je dois donc chaque fois attendre qu’il fasse demi-tour avant de tourner  moi-même (toujours en utilisant les repères au sol).Pour m’aider à me positionner, la tour me donnera des indications par radio quant à la position du Blériot (vu qu’il n’a pas de radio et que, même à 200-300m, j’ai du mal à le voir).
Comment se passe ce premier vol ? Une fois en vol, je découvre d’autres facteurs… Tout d’abord, je ne peux pas serrer mes virages autant que je le voudrais : le vent me pousse vers la piste. Je dois donc me décaler… et  n’ai donc aucune chance d’apercevoir le Blériot avant de tourner. De plus, la vitesse extrêmement basse à laquelle je vole (enfin, pour un F-16) ne me laisse pas de marge : Dès que mon virage est engagé je suis obligé de le finir, au risque sinon de dépasser mon axe de présentation (interdit par mesure de sécurité). L’attitude de l’avion (très cabré) m’empêche aussi de voir le Blériot devant moi : je ne le vois en fait qu’une fois que je le dépasse, le reste du temps, il est caché par le nez de mon F-16. Ajoutons à cela que nos 2 vitesses par rapport au sol sont influencées par le vent (nous progressons plus ou moins vite sur l’axe de présentation) et ça devient vite un véritable casse-tête ! Nous ferons 3 passes d’entraînement le mercredi avec un résultat à peu près concluant mais la démonstration est considérée « safe » et nous nous donnons donc rendez-vous samedi, devant le grand public.
Et samedi c’est le grand jour ? Le jour même, le vent a évidemment changé et je n’arrive pas du même côté qu’à l’entraînement, … donc c’est encore du travail;  il faut tout reconsidérer et recalculer! Finalement, nous avons fait 3 passages qui, je pense, étaient assez bien réussis. Le moment photo des deux avions volant ensemble a été immortalisé par un grand nombre et restera un très bon souvenir et un grand moment pour moi en cette dernière saison de ‘’Solo Display’’.

         

Le ciel de Kleine-Brogel a abrité ce moment historique, très rare dans la programmation d’un Airshow.
Bravo et merci aux deux pilotes, qui ont fait preuve de beaucoup d’audace et d’une parfaite maitrise de leur machine respective.
Que rêver de mieux pour fêter 100 ans d’Aviation…Le public, conquis et reconnaissant, a longuement applaudi Mikael et Grat.
Good show.