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Kleine-Brogel, Ciel en feu
Les anciens retrouvent des ailes
Serge Nemry – Octobre 2014
Répondant à l’amicale invitation du Colonel Aviateur Paul
Desair, Chef de corps du 10ème Wing TAC, de nombreux anciens de la
Force Aérienne (Composante Air) ont rallié ce vendredi 12 septembre
l’espace qui leur était réservé le long de la piste de Kleine-Brogel.
Membres des Vielles Tiges de l’Aviation Belge, de la Belgian Air Force
Association, de la Mirage 5 Pilot Association, des Silver Spurs, des
Silver Wings, du Dakota, des Old Timers SABENA et d’autres encore
: pilotes, mécanos, navigateurs, loadmaster, contrôleurs aériens,
flight engineers se sont retrouvés dans ce cadre esprit Force
Aérienne.
Au
programme du jour, retrouvailles entre copains d’escadrilles,
évocations de souvenirs d’une ‘’autre époque’’, cafés, apéro, déjeuner
et pintes de l’amitié. Une rencontre conviviale sous un ciel coloré de
fumigènes et dans une ambiance musicale ‘’turbines et pistons’’
imprégnée de senteurs de kérosène. De cet emplacement idéalement situé,
quoique un peu décentré pour la Joint Fire Power Demo (les opérations
peuvent être suivies sur un écran géant), ces spectateurs
avertis peuvent suivre les arrivées des participants aux Belgian
Air Force Days 2014 ainsi que quelques répétions
préliminaires à l’Air Show du week-end.
Les
discussions, souvent animées, offraient une belle rétrospective de
l’ambiance qui régnait par le passé dans les nombreux wings de la FAé.,
lorsqu’il y avait encore beaucoup d’escadrilles et … beaucoup d’avions.
La comparaison ‘hier et aujourd’hui’ était souvent ponctuée d’un ‘’de
mon temps’’… Durant toute la journée, l’ambiance est restée ‘’esprit
Force Aérienne‘‘ et c’est avec beaucoup de plaisir que le barman
a fait mousser la youpiééééééééé, appellation, donnée par un serveur
très sympa, de la Jupiler !
Tonnerre de feu
Aujourd’hui
ce sont les F-16 qui occupent la plaine limbourgeoise et ce sont les
pilotes des 31ème Tiger, 349ème Goedendag et de l’Operational
Convertion Unit (OCU) qui mettent le feu dans le ciel de KB. Le café
matinal à peine refroidi et voilà que la Power Demo est lancée ;
il est 10h30, le planning est respecté ! Cette démonstration de la mise
en œuvre des moyens aériens belges, appuyés par des aéronefs étrangers
et des troupes aéroportées, n’avait pas encore été montrée au public,
la seule ‘’représentation’’ ayant eu lieu à Beauvechain en 2013 en
comité restreint. Une première donc qui a suscité l’intérêt de ceux qui
ont volé à la ‘’chasse’’, à la chasse-bombe, à la Recce ou au
transport. Chacun y allait de son analyse et de ses commentaires quand
à l’évolution technologique particulièrement impressionnante des
systèmes d’armes opérés aujourd’hui. Il est vrai que dans l’assemblée
quelques uns ont connu le Meteor, premier jet mis en service à la FAé.
Pour eux qui ont piloté ce biréacteur dont la vitesse maximale était de
700 km/h et n’avait pour tout armement que quatre canons de 20
mm, entendre parler de missiles AMRAAM, Sparrow, Maverick ou de
bombes à guidage de précision JDAM, c’est passer dans un autre monde.
Dans le cadre de cette Power Demo, des moyens importants sont engagés
et mettent en œuvre : un Drone B-Hunter, une dizaine de F-16 dont
ceux du QRA (Quick Reaction Alert), un C-130, deux Agusta A109, un
NH90-TTH flambant neuf, épaulés par un Mil Mi 24 tchèque et un E3A
AWACS.
Le
scénario débute par l’attaque d’un checkpoint tenu par les
troupes belges. Devant l’ampleur de l’agression, appel
est fait au soutien aérien via un centre de coordination des moyens
aériens alliés.
Le
B-Hunter croise en altitude et envoie nombre d’informations sur les
mouvements ennemis. Deux F-16 armés ''air-air'', maintenus en état
d’alerte, reçoivent l’ordre de décollage afin d’assurer la défense de
l’espace aérien et d’empêcher toute intrusion d’aéronefs ennemis. Loin
dans le ciel et loin des belligérants, un AWACS scrute en permanence
l’espace aérien à la recherche de tout avion
identifié
comme potentiellement dangereux et communique aux ‘’chasseurs’’ toutes
les informations nécessaires à l’interception via un système crypté.
D’autres F-16, munis de munitions à guidage de
précision,
viennent anéantir les positions d’artillerie ou les ‘’nids’’ de
mitrailleuses lourdes localisées par le Forward Air Controler (FAC) qui
travaille depuis le sol et au plus près des lignes adverses. Lors du
passage sur zone, les pilotes tirent préventivement des leurres et
engagent des manœuvres d’évitement pour contrer le tir de
missiles sol-air. Le Mil-mi 24 tchèque, armé de son puissant canon
rotatif, et les Agusta A109, équipés de mitrailleuses ‘’minigun’’
placées en sabords pour l’un et de missiles antichars pour
l’autre, assurent ensuite une surveillance rapprochée et tiennent
les agresseurs à distance. Cette manœuvre sécurise l’environnement
direct de la piste provisoire et balisée et autorise l’atterrissage
d’assaut d’un C-130 Hercules.
Ce dernier, moteurs tournants, prêt à redécoller au moindre signe
de danger, débarque des commandos lourdement armés qui vont prendre
possession du terrain et poursuivre l’ennemi si nécessaire. En
certaines conditions, cela peut également se faire par parachutage
depuis un avion de transport ou par descente en rappel d’un
hélicoptère, spécialement dans le cas des Force Spéciales.
Les F-16 qui ont ‘’brûlé’’ beaucoup de carburant se ravitaillent auprès
d’un tanker allié envoyé en soutien des forces aériennes engagées et
reviennent cercler au-dessus du terrain. Dès que les commandos sont en
place le C-130 redécolle,avec tojours une protection des hélicoptères.
Un
exercice dont l’ampleur est intensifiée par des effets pyrotechniques
‘’allumés’’ depuis le sol par des artificiers spécialisés de la Défense
et au cas où…les pompiers ne sont jamais loin.
Mission accomplie, les ‘’Viper’’, avant de se poser, font quelques passages en escorte du C-130 et de l’AWACS.
Ballets aériens
Les
dernières volutes de fumée des multiples explosions à peine dissipées,
ce sont les répétitions qui agrémentent l’après-midi. La partie dédiée
aux arrivées ainsi qu’aux répétitions est lancée avec le passage de 7
Alpha Jet qui marquent le ciel de 7 trainées blanches. Pour les
pilotes venus spécialement de Cazaux, il s’agit d’un vol de repérage et
d’un test du système fumigène ; le lendemain ce seront les
couleurs
nationales qui seront lâchées. Soudain, le rugissement de
turboréacteurs SNECMA se fait entendre de plus en plus fort :
c’est un Rafale C de l’Escadron de Chasse 1/7 Provence porteur de
l’insigne de tradition des ‘’Tiger’’ en provenance de la BA-113
d’Istres qui se présente en finale. Le décollage de la Patrouille de
France, arrivée la veille, attire les regards : c’est toujours un beau
spectacle. Le trio formé des Athos (call sign) 0 et 9 et d’un Alpha Jet
bleu blanc rouge, sans numéro d’identification, est le
premier à prendre l’air, suivi du quatuor formé par les Athos 1,
2, 3 et 4 et ensuite de la dernière formation composée des Athos 5, 6,
7 et 8, direction Amiens pour une présentation programmée le lendemain.
Moins bruyant mais plutôt rare dans notre ciel, un Antonov An26
‘’Curl’’ de la Hungarian Air Force transportant équipe de support
et matériel
pour le Mig 29 vient atterrir. Venus de leur base britannique de
Lakenheath, deux F-15 Eagle font une passe sonore remarquée puis se
posent pour rejoindre leur place au statique.
Au
passage, devant la terrasse, les chasseurs de l’USAF saluent
amicalement les anciens. ‘‘Zeus’’, le dieu des dieux grecs foudroie le
ciel pour se poser à KB. Ce Block 52, le seul F-16 de démonstration
doté de réservoirs conformes (Comformal Fuel Tank-CFT) sur le
fuselage, est piloté par le Capitaine Sotioros Stralis, F-16 Demo Team.
Pilote et appareil proviennent du 115 Combat Wing, 340 Squadron basé à
Souda en Crête (Hellenic Air Force). La décoration spéciale de
l’avion date de cette année. Tour à tour, un C-160 Transall de l’Armée
de l’Air française, un SAAB JAS 39 Gripen de la Hungarian Air Force,
deux Eurofighter EF 2000 Typhoon du JG74 ‘’Mölders’’ de la
Luftwaffe viennent rejoindre le parc des avions en exposition.
Il y a de nouveau du SNECMA dans l’air…avec ce Mirage 2000N du
2/4 Lafayette de la force de frappe nucléaire française basé à
Istres. Un petit coup de nostalgie avec ce beau Spitfire LF IXc
qui fait ronronner les 1.400 chevaux de son Rolls Royce Merlin pour le
plus grand bonheur des moustachus présents. La Força Aérea Portuguesa
participe avec un F-16 détaché de l’Esquadra 201 ‘’Falcöes’’ de Monte
Real.
Subitement, du seuil de piste s’élève un énorme nuage de
fumigènes tricolores : ce sont les Frecce Tricolori qui testent
leurs couleurs nationales
avant de décoller en 2 formations de 5 avions. L’altitude de sécurité
atteinte, ils ne forment plus qu’une seule formation de 10 appareils.
Le spectacle à l’italienne commence et petit à petit le ciel s’emplit
de vert, blanc et rouge. Au sol, l’odeur de kérosène se mélange à celle
des fumigènes.
Ce sont ensuite un Alpha Jet et un Fouga Magister qui décollent de
concert ; au travers de ce tableau historique, ce sont des milliers
d’heures de
vol qui sont évoquées et qui, avec le Fouga, nous ramènent en
1960…L’Alpha Jet AT-29 a été le premier utilisé comme solo
display avec Louitje Baum (11ème Escadrille) comme pilote ; il porte
une décoration particulière commémorant côté droit les 35 ans de
mise en service de l’Alpha Jet à la Force Aérienne belge et, côté
gauche les 10 d’existence de l’Advanced Jet Training School (AJeTS) qui
opère depuis Cazaux. Le Fouga Magister est un modèle français s/n 569
qui a été restauré et remis en état de vol avec l’aide de EADS
(European Aeronautic Defense and Space Company -Airbus Group).
Coup
de tonnerre sur Kleine-Brogel ! : de toute la puissance de ses deux
turboréacteurs Klimov, un Mikoyan Mig 29 polonais décolle pour une
présentation des capacités de cet avion de construction soviétique. Dès
qu’il a atteint la zone d’évolution, le Fulcrum entame, post combustion
à pleine puissance, une série de manœuvres impressionnantes dont un
tonneau, train d’atterrissage sorti.Deux pilotes expérimentés du 23
Tactical Squadron de Minsk, le Ltn.Col. Piotr ‘’Kuman’’ Iwaszko et le
Capitaine Adrian Rojek alternent les démonstrations sur le Mig29
Fulcrum. La dérive intérieure gauche est décorée du portrait du Wing
Commander Wojciek Kolaczkowski, héros polonais de la Seconde Guerre
mondiale. Tandis que sur l’extrados est peint l’emblème du RAF 303
Squadron ‘’Kosciuszko’’, unité polonaise créée au sein de la Royal
Air Force.
Les réacteurs du Fulcrum à peine éteints, nous assistons à un ballet de
F-16 avec d’abord l’atterrissage de deux Fighting-Falcon du 313
Squadron ‘’Tiger’’ néerlandais à la devise bien aiguisée
‘’Scherpgetand’’, suivi des décollages de Slik, Grat et Yusuf. Les
trois F-16 ‘’Solo Display’’ (Pays-Bas, Belgique et Turquie) vont
participer à un vol photo au-dessus de Sanicole tout proche.
Après
un court moment de silence, un nouveau tableau se présente avec le
Stampe SV-4b de Guido Truyens , un ancien ‘’Tiger’’, encadré par
deux Marchetti SF-260M des Red Devils. Une fois encore beaucoup
d’anciens revivent leurs premiers vols sur l’emblématique biplan tandis
que d’autres se remémorent leurs prestations acrobatiques sur le
Marchetti. Incident à l’atterrissage : le SV-4 de Guido est légèrement
soulevé par le vent et l’aile gauche touche puis racle la piste ; une
réparation provisoire, avec du ruban adhésif très résistant sera
réalisée par le Repair service de KB de manière à ce que l’avion puisse
être ramené en vol vers sa base d’attache. Le T-6 Harvard, qui à lui
aussi fait les belles et ardues heures de
nombreux
élèves pilotes et de moniteurs tant à Kamina qu’à Brustem, se
positionne dans l’axe de présentation des avions lents, escorté par un
T-28 Trojan.Danny Cabooter, bien connu pour l’organisation du Stampe
Fly In à Deurne, pilote le premier tandis que Chris Vandenberghe est
aux commandes du second. Le soleil entame sa lente descente vers
l’horizon quand deux Rafale de la 17F, Marine Nationale française,
touchent la piste. Ce sont les dernières images captées en
cette belle journée que tous ont appréciée.
Rendez-vous en 2016 au 2 Wing TAC de Florennes…Taïaut…! Et peut-être que dans quelques années…suivez la casquette !