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L’A400M, un défi pour le futur
Benoît Denet - Octobre 2012
Lors du Salon Aéronautique de Farnborough j’ai eu l’occasion de
m’entretenir avec Damien Allard, Market Development de l’A400M Atlas
(son nouveau nom) chez Airbus Military, une bonne opportunité de
revenir sur ce gigantesque programme.
Airbus Military a été constitué en avril 2009 au sein d’Airbus, mais
gère ses pertes et profits de manière autonome, elle emploie au total
plus de 5000
personnes. La gamme des produits d’Airbus Military comprend des
appareils offrant une charge utile allant de trois à 45 tonnes.
Parmi ceux-ci, l’A400M en est le fleuron, sa chaîne d’assemblage
à été inaugurée en 2007 sur le site de San Pablo en Espagne.
Le programme A400M fut lancé en 2003 pour répondre à la demande
de sept pays européens (Belgique, France, Allemagne, Luxembourg,
Espagne,
Turquie et Royaume-Uni), la Malaisie les a rejoints en 2005. Le premier
vol s’effectua le 11 décembre 2011.
Cet
appareil est très polyvalent et peut effectuer divers types de missions
: tactiques sur courtes distances, stratégiques ou
logistiques sur des longues distances ou encore du ravitaillement en
vol.
Son
large fuselage lui permet
d’emporter, entre autres, les hélicoptères NH-90 ou CH-47 ou encore des
engins de levage de grande capacité ou bien des véhicules semi-remorque
de 25 tonnes.
Voici ce qu’en dit Damien Allard :
Du point de vue des capacités de transport, l’A400M peut transporter jusqu'à 66
civières; comparé au C130, celui-ci peut transporter jusque 74 civières mais simplement l’A400M est un
avion moderne, adapté aux opérations modernes pour lesquelles les
armées n’ont pas besoin d’emporter autant de civières. Dans le C160, il
y a 5
civières superposées alors que dans l’A400M celles-ci sont à hauteur
d’homme, ce qui facilite l’embarquement. En discutant avec des
équipages de C160, on apprends qu'il est très difficile de charger
ces civières ! Dans notre avion en plus des 66 civières, nous avons 25
sièges pour les médecins
et assistants et tous les plugs pour les équipements d’assistance. Ces
civières sont en permanence dans l’avion de même que deux rangées de 27
sièges, ce qui permet par exemple le transport d’un blindé avec ses
fantassins dans le même avion.
En
charge utile, nous sommes à
37 tonnes, ce qui est beaucoup plus que les avions actuels, pour vous
donner un ordre d’idées, ce sont 90 % des équipements roulant, en
service dans les armées européennes,
qui peuvent être transportés. La seule grosse exception étant les chars de combat, comme le Leclerc.
En convoyage, nous parcourons 4500 Nm. Mais ce qui est vraiment
intéressant, c’est qu’avec 20 tonnes à bord, on est alors à 3450 Nm et
avec 37
tonnes (charge maxi) on est à 1780 Nm. Comparé avec le C130 et 20
tonnes à bord, l’A400 M parcourt le double de distance.
D’un aspect proximité du théâtre d’opération c’est aussi avantageux :
«
Tout ces matériels peuvent être emmenés directement là où les armées en
ont
besoin, à côté des FOB (Forward Operating Bases). Si on prend l’exemple
du retraits des forces françaises d’Afghanistan, il faut d’abord
acheminer par la route tout le matériel réparti un peu partout vers
Kaboul et ensuite les faire évacuer en Antonov 124 par exemple, alors
qu’avec l’A400M dans quelques années, il sera possible d’aller
directement sur une piste sommairement aménagée pour les embarquer.
Qu’en est- il de l’utilisation de pistes sommairement aménagées ?
Nous avons essayé de suivre au maximum ce que pouvait faire le
C160 Transal, un appareil plus léger avec une charge utile beaucoup
plus petite que
l’A400M ; au final, nous sommes plus performants que le C130. Par
exemple nous délivrons 25 tonnes sur une piste CBR6 alors que le C130
ne peut délivrer que 10 tonnes. (Remarque: CBR 6 est une norme
d’épaisseur de la chaussée de 400 mm et une résistance faible - CBR
pour California Bearing Ratio.)
Le Transal est un avion
exceptionnel à ce niveau-là, mais il reste très limité avec 16 tonnes
de charge utile en théorie, mais lorsque vous allez dans les escadrons
de transport de l’Armée de l’Air, ils vous diront qu’ils ne
transportent jamais 16 tonnes.
Qu’en est-il des délais de livraisons ?
Le premier avion sera livré à la France fin 2012 début 2013
suivi par la Turquie et le Royaume-Uni en 2014. Pour la Belgique et le
Luxembourg,
la livraison du premier A400M est prévue pour 2018.
Je me suis osé à lui demander pourquoi l’A400M n’avait pas été présenté en vol lors de ce Salon de Farnborough 2012 ?
Est-ce
que tous les fabricants font voler leurs avions lors de ce salon ?
Voilà, je n’ai pas d’autre commentaire à faire; il est venu en vol par
ses propres moyen, nous ne l'avons pas amené en bateau.
Monsieur Allard nous explique ensuite depuis le cockpit l’A400M quelques caractéristiques de celui-ci:
C’est un avion Airbus avec une philosophie Airbus dans le
cockpit et donc deux « sidestick ». Huit grands écrans interchangeables
à cristaux
liquides y sont installés, avec 6 d’entre eux servant aux informations
primaires de vol, à la navigation et au contrôle ou à la vidéo, les
deux autres servant au suivi du fonctionnement des systèmes. Autre
innovation avec un « head up display »
(HUD) avec toutes les références et paramètres de vol, très utiles lors des phases critiques de mission.
C’est
donc un appareil qui se pilote à deux : pilote et co-pilote mais à la
demande de certaines forces aériennes, nous avons installé un poste
pour un troisième membre d’équipage pour des scénarios complexes comme
du vol à très basse altitude, mais il s’opère très bien à trois
avec
un loadmaster.
Vous savez, c’est un appareil complexe avec beaucoup d’innovations, notamment ses moteurs : le TP400, le turbo
propulseur le plus puissant en fabrication, 44000 chevaux au total pour
l’A400M. Il peut voler à 40.000 pieds, avec une vitesse de croisière
qui tourne entre Mach 0,68 et 0,72, ce qui permet un transport plus
rapide et plus confortable car au-dessus des zones de turbulences et
avec un très bon niveau acoustique. A ce propos, à l’origine cet avion
devait être équipé avec un système d’absorption du bruit avec une série
de hauts –parleurs pour compenser d’éventuels bruits extérieurs, mais
on s’est rendu compte qu’il était tellement silencieux quecela n'était pas nécessaire.
Voici pour finir un éventail impressionnant des caractéristiques de cet appareil :
-Il
peut ravitailler en vol à des vitesses variant de 110 Knots nœuds
(205 km /h) pour les hélicoptères à 300 nœuds pour les avions de combat
ou gros porteurs et jusque 27.000 pieds d’altitude.
- Il peut transporter 160 parachutistes entièrement équipés.
-
Il est doté de quatre turbo propulseurs contrarotatifs entièrement
nouveaux de type TP 400 développés spécifiquement pour lui par le
consortium Europrop International (EPI).
- Il est construit avec 30% de matériaux composites afin de réduire sa masse, c’est à dire plus que dans l’Airbus A380.
-
Il peut être équipé en option d’un système de vision améliorée (Enhance
Vision System – EVS) qui repose sur la technologie d’imagerie
infrarouge frontale (FLIR).
- Son nouveau concept de maintenance,
qui s’inspire dans une large mesure des avions de transport
commerciaux, se traduit par une très haute fiabilité fixée à 98,7% pour
sa mise en service avec des coûts réduits. En 12 ans de service,
l’A400M ne passera au sol que 84 jours pour effectuer la maintenance
générale obligatoire.
Commandes à ce jour de l’A400M :
- Belgique 7
- France 50
- Allemagne 53
- Luxembourg 1
- Malaisie 4
- Espagne 27
- Turquie 10
- Royaume-Uni 22