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Septembre 2008 : 65ème anniversaire
et cours de répétition à la Base Aérienne de Sion.

Patrick Peulmeule - Mars 2011

La Base Aérienne de Sion, implantée sur l'aérodrome mixte civil/militaire de la capitale du canton suisse du Valais, a célébré en septembre 2008 ses 65 ans d'existence. Pour l'occasion, des journées Portes ouvertes y ont été organisées les vendredi 26 et samedi 27 septembre 2008, alors même que se déroulait le cours de répétition annuel des unités des Forces Aériennes Suisses affectées, en temps de mobilisation, à cet aérodrome. Une activité aérienne soutenue pouvait ainsi être admirée dans le décor magnifique du Valais central, encadré par les hautes chaînes montagneuses des Alpes bernoises au nord et des Alpes valaisanes au sud.


La Base Aérienne assure le service de vol (engagement et maintien constant en état de vol) des divers aéronefs militaires (avions et hélicoptères) appelés à y opérer, ainsi que le support sous différents aspects (entretien des systèmes électroniques au sol et embarqués, surveillance de l'aérodrome, gestion du centre d'apprentissage). Elle garantit la disponibilité des infrastructures et du matériel nécessaires à la formation et à l'entraînement des escadrilles et du personnel les mettant en oeuvre. Il est à noter que les militaires, en assurant l’entretien technique de la piste (y compris le déneigement) et des équipements aéroportuaires (ILS entre autres), jouent ainsi un rôle essentiel dans le développement du trafic civil (voir l'article de Serge Nemry dans la rubrique reportages 2011).
En temps normal; la Base Aérienne emploie environ 160 personnes. Celles-ci relèvent des Forces Aériennes elles-mêmes (support service de vol et support aérodrome, 70 personnes et 40 apprentis), mais aussi de la BLA (Base logistique de l’armée : appui logistique et infrastructure, 28 personnes), de Skyguide (gestion du trafic aérien tant militaire que civil, 15 personnes) et de RUAG Aerospace (1 personne).

Le cours de répétition

Dans le cadre général de l'organisation de l'Armée suisse, les cours de répétition annuels (CR), d'une durée de trois semaines, ont pour objet de maintenir le standard opérationnel des différentes unités, en particulier de celles ayant le statut de milice (réservistes). Dans le cas de Sion, la base prend lors du CR l'appellation de Base Aérienne 14. Les structures permanentes sont alors renforcées par l'apport de miliciens en situation de rappel et d'un noyau de professionnel pour la mise en oeuvre des avions de combat F/A-18 Hornet et F-5 Tiger II. Placée sous le commandement d'un état-major spécifique, la BA 14 regroupe l'Escadre d'Aviation 14, un groupe de support, un groupe logistique et une compagnie de sûreté, soit au total environ 800 militaires en service.
L'Escadre d'Aviation 14 est elle-même composée des Escadrilles d'Aviation 18 (volant sur F/A-18) et 19 (F-5), assistées d'une Compagnie d'Aviation (Cp Av 14) responsable notamment de la préparation et de l'armement des avions (1).

L'Escadrille 18 (Esc Av 18), comme les deux autres escadrilles volant sur Hornet, est une unité professionnelle à temps plein ; elle opère en temps normal à Payerne avec ses F/A-18 C et D. Par contre, l'Escadrille 19 (Esc Av 19) est une unité de milice, dont le cours de répétition est le temps fort annuel, toute l'unité étant mobilisée et opérant à partir de son aérodrome d'affectation du temps de crise. Les pilotes de milice effectuent, outre le CR, plusieurs cours d'entraînement (CE) d'une semaine chacun ainsi que des vols d'entraînement individuels (IT), le nombre d'heures de vol annuel devant être au minimum de 50 (l'espacement entre deux vols ne doit par ailleurs pas excéder quatre semaines). Ces pilotes exercent le reste du temps un emploi civil, souvent en tant que pilote dans une compagnie commerciale mais qui peut aussi très bien être sans rapport avec l'aviation (exemples souvent cités : ingénieur, avocat, instituteur, cadre . . .). Les Escadrilles d'aviation de milice restantes (Esc Avi 6, 8 et 19) volent toutes sur le Tiger, dont une cinquantaine restent en service actuellement sur les 110 exemplaires livrés entre 1979 et 1985 suite à deux commandes distinctes (étant précisé que 44 ont été revendus à l'US Navy entre 2003 et 2008).

               

   
     

On notera à l'intention des spotters que, d'une manière générale, le système de gestion des avions est centralisé, ce qui implique que les appareils sont alloués aux escadrilles en fonction des besoins et non pas affectés en propre. Ceci est particulièrement vrai pour les escadrilles de milice, qui ne sont activées que temporairement. Il en résulte que les insignes portés sur les F-5 ne reflètent pas forcément l'appartenance à l'unité correspondante. De plus, beaucoup de Tiger portent encore les insignes d’escadrilles ou de formations dissoutes (nombreuses), une belle manière d'en conserver bien haut les couleurs. Seuls les F-5E affectés à la Patrouille Suisse (J-3080 à J-3091) font exception à cette règle, ce qui ne les empêche pas de servir, en dehors des activités propres à celle-ci, à des missions d'entraînement opérationnel, souvent en tant que plastron eu égard à leurs couleurs vives.
Quant aux Hornet équipant les trois escadrilles professionnelles, les insignes ne sont pas portés, à l'exception notable de trois appareils. Il s'agit du J-5011 pour l'escadrille 11 "Tigers" (Meiringen), du J-5017 pour l'escadrille 17 "Falcons" (Payerne) et du J-5018 pour l'escadrille 18 "Panthers" (Payerne). Ils ont reçu en outre chacun une décoration spéciale de dérives et peuvent ainsi être considérés comme les "flagships" de chacune de ces unités.
Le cours de répétition 2008 a eu lieu du 15 septembre au 3 octobre, les activités de vol proprement dites ayant été concentrées sur onze journées, hors week-ends. Ces activités sont intensives, les sorties (5 à 6 par jour) regroupant généralement six à huit avions (F-5E et F, F/A-18C et D) ; elles s'inscrivent dans le cadre de l'entraînement à la mission de police du ciel et de défense aérienne dévolue aux Forces Aériennes.
Cette mission a été particulièrement mise en exergue pendant les CR de janvier 2006 et janvier 2009, durant lesquels la Base Aérienne 14 a été responsable de l’engagement depuis Sion des F/A-18 et F-5 chargés de la protection de l’espace aérien dans le secteur de Davos, où se déroulait le Forum économique mondial (WEF). Les appareils, équipés de munitions de combat, ont ainsi surveillé en permanence le secteur pendant la durée du WEF, afin de faire respecter l’interdiction de vol édictée et de pouvoir intervenir immédiatement en cas de nécessité (des Pilatus PC-7 participaient aussi au dispositif).

65ème anniversaire

L'année 2008 correspondait au 65ème anniversaire de la création sur l'aérodrome de Sion d'un premier détachement militaire (Détachement 32 du Parc Aviation d'Armée), intervenue le 26 avril 1943. Cette installation marqua le début du développement continu des infrastructures jusqu'à faire de cet aérodrome l'une des bases principales des forces aériennes suisses. La piste en dur de 900 mètres, inaugurée en août 1943, fut portée à 1500 mètres en 1950 et à 2000 mètres en 1965, puis renforcée en 1974. Elle est apte à recevoir tous les types de jets de combat en service mais aussi les avions de transport civil jusqu'aux moyens courriers. Les installations techniques et administratives militaires n'ont cessé de se renforcer et de se moderniser, pour preuve dans les dernières décennies, la mise en service de "boxes" avions entre 1990 et 1992, celle du bâtiment CIP (Centre d'instruction des pilotes) inauguré officiellement le 27 mars 1996, la nouvelle tour de contrôle en octobre 1996, l'adaptation à la mise en service du F/A-18 (1997), l'installation d'un système de mesure du bruit des aéronefs (2005) . . .
Notons aussi que, jusqu'à leurs fermetures échelonnées entre 1994 et 2003 dans le cadre de plans de réorganisation de l'Armée, l'Exploitation de Sion, comme elle était alors nommée, était également responsable des bases de guerre existant en Haut Valais (Raron, Munster, Ulrichen et Turtman).
On peut citer quelques faits marquants de la vie de la Base parmi bien d'autres au fil des ans : premier atterrissage d'un avion à réaction (de type Vampire) le 20 septembre 1946, premier atterrissage Mirage III le 6 janvier 1967, gestion du Centre de maintenance Vampire à partir de 1976 puis de celui de son successeur Hawk jusqu'en 1995, vente aux enchères des Vampire biplaces en mars 1991, accueil régulier des multiples CE/CR et Ecoles de pilotes, d'un mini Tiger Meet en mars 2005 (Snow Tiger - une quinzaine d'avions), engagements d'hélicoptères dans des missions de sauvetage et d'assistance (incendies de forêt, inondations, avalanches notamment), etc . . .
Remontant pour la plupart aux années 1980, voici quelques photos évocatrices d'une période faste tant en nombre qu'en variété d'appareils en service. C'est d'ailleurs en 1981 que le trafic militaire a atteint son apogée à Sion, avec 18 000 mouvements environ (contre une moyenne annuelle descendue à 7 500 entre 2001 et 2010).
   
     
   
 

Journées Portes Ouvertes

Les 26 septembre après-midi et 27 septembre 2008 toute la journée, la Base Aérienne était donc ouverte au public, en l'honneur de cet anniversaire. La matinée du 26 avait été réservée à l'inauguration officielle en présence de deux cents invités, essentiellement des personnalités économiques et politiques régionales.
Une exposition statique avions et hélicoptères, regroupant la plupart des appareils en service dans les Forces Aériennes Suisses, avait été organisée sur le tarmac de la base sédunoise. Les appareils de chasse étaient présentés "en situation" : un F/A-18 était visible dans son abri d'alerte, tandis que quelques F-5 et F/A-18 faisaient l'objet de diverses démonstrations de maintenance et d'armement par le personnel au sol. Alignés devant les hangars, on trouvait la famille des trainers Pilatus actuels au grand complet (PC-7, PC-9 et le tout nouveau PC-21), accompagnés du PC-6 Turbo-Porter de transport et liaison, tandis qu'une Alouette III et un Super-Puma représentaient les voilures tournantes.

   
       

Emblématiques du passé de la base, un DH-100 Vampire Mk6, un Hawker Hunter Mk58 et un Mirage IIIRS symbolisaient les trois premières générations de chasseurs à réaction utilisés par les Forces Aériennes Suisses.

   
Quelques mots sur ces appareils vétérans : le Vampire J-1197 est maintenu en état de vol sur l'aérodrome de Sion par son propriétaire Eric Chardonnens, qui le présente lui-même avec brio durant la saison des meetings aériens (comme ce fut le cas au meeting du Centenaire de l'Aéronavale à Hyères en juin 2010). Quant au Hunter et au Mirage, ils sont tous deux en temps normal exposés sur la base en tant que "monuments". Le Hunter J-4100 a pour l'occasion été descendu de son piédestal proche de la tour de contrôle et, après rénovation, remis sur roues le temps des JPO (il était même possible de s'installer dans le cockpit). Il fait partie des appareils à avoir volé avec l'Escadrille d'Aviation 5 (milice), dont les derniers vols eurent lieu à partir de Sion en novembre 1994, avant sa dissolution résultant du retrait du Hunter en Suisse et de la fermeture de sa base opérationnelle de Raron. Parmi les noms des pilotes de cette unité inscrits sous la cabine, on relève celui, illustre, de Claude Nicollier, l'astronaute suisse ayant effectué non moins de quatre missions à bord de navettes spatiales américaines (parmi ses multiples activités actuelles, Claude pilote l'un des Hunter de collection volant régulièrement en Suisse).
Le Mirage IIIRS (R-2114 ) rappelle notamment que, jusqu'au retrait du type intervenu en fin 2003, un détachement de l'Esc Avi 10 opérait à partir de Sion pendant les cours de répétition.

Les présentations en vol du vendredi après-midi se sont intercalées entre les départs et retours des Hornet et Tiger du CR en missions opérationnelles, à la différence du samedi où ces derniers n'ont pas volé. Le PC-7 Team, le Hornet Solo Display et la Patrouille Suisse se sont succédés dans le ciel valaisan, démontrant leur savoir-faire et leur légendaire précision à un public admiratif et conquis. Ces évolutions étaient encore magnifiées par le superbe cadre montagneux entourant l'aérodrome. Diverses animations et expositions au sol (présentation des travaux du centre d’apprentissage de polymécaniciens, de véhicules spéciaux des Forces Aériennes, démonstrations cynophiles   ) complétaient le programme de ces JPO attractives et parfaitement organisées.

   
         
       

En définitive, de bien belles journées sous le légendaire soleil du Valais, qui auront attiré pas moins de 18 500 personnes (contre
6 000 pour le 60ème anniversaire en 2003), un très beau résultat pour une manifestation à participation purement nationale. Cette affluence montre que, malgré les problèmes existant du fait des nuisances sonores, la population locale reste attachée à sa Base aérienne, dont les activités induisent des retombées économiques importantes. Quant aux spotters, beaucoup sont venus de loin (des cantons suisses, mais aussi de l'étranger : Italie, Pays-Bas, Belgique, France . . .), comme toujours à Sion et leur présence ne peut qu'influer favorablement sur le tourisme local, hôtellerie et restauration . . .
Rendez-vous, espérons-le, pour de nouvelles JPO en 2013 pour le 70ème anniversaire de la Base Aérienne . . . sans oublier bien entendu le Breitling International Airshow qui déploiera ses fastes à Sion les 16, 17 et 18 septembre 2011.


(1) Quatre langues sont utilisées au sein de la Confédération Helvétique : l'allemand, le français, l'italien et le romanche (par ordre d'importance dégressif). Dans un souci de simplification, les désignations et abréviations francophones des unités ont été retenues. Pour mémoire, nous indiquons ci-après les équivalents de ces termes en allemand, la langue majoritaire :
- Base Aérienne  (BA)                 : Flugplatzkommando     (Flpl Kdo)
- Escadre d'Aviation  (Esca Av)   : Fliegergeschwader    (Fl Geschw)
- Escadrille d'Aviation (Esc Av)  : Fliegerstaffel         (Fl St)
- Cours de répétition (CR)          : Wiederholungkurs    (WK)