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Le sort des avions de Sabena en Europe

 Le 15 mars 1939, la Tchécoslovaquie est envahie par les troupes allemandes et les services de la Sabena vers Prague sont suspendus. Le 1er septembre, la Pologne subit le même sort ce qui marque le début de la deuxième guerre mondiale. Les belligérants Anglais, Allemands, Français et Polonais interdisent leurs espaces aériens aux avions étrangers le 3 septembre. Cependant les vols vers la Hollande et la Suède se poursuivent pendant quelques jours mais tous les services aériens en Europe sont interrompus le 13 septembre. Afin d’éviter toute confusion avec les avions allemands les six JU52 basés à Bruxelles sont évacués vers le Congo; les trois premiers quittent en novembre 1939 et les trois autres en janvier 1940. les vols de la LBC effectués au moyen des trois S83 reprennent le 14 février 1940, à raison d’une liaison par semaine avec l’autorisation de la France pour les départs depuis Marseille
(à partir de ce jour, les S83 ne sont plus présents en Belgique). En ce qui concerne Sabena Europe, après concertation avec les autorités anglaises, les vols reprennent en mai 1940, avec une fréquence de deux vols journaliers de Bruxelles – Haren vers Shoreham dans le sud de l’Angleterre et non plus vers Londres- Croydon. Il en va de même pour les vols à destination d’Amsterdam. Les deux DC3 OO-AUH et AUI sont prévus pour ces opérations, bien que l’horaire de la compagnie indique uniquement le S73 comme avion utilisé. La Grande-Bretagne exige que les avions des pays neutres (SABENA , KLM pour la Hollande,  DDL au Danemark, ABA la suédoise) soient peints en orange; pourvus de la nationalité inscrite en grandes lettres noires sur le fuselage et hublots occultés. Le 2 mai sont organisés des baptêmes de l’air pour des adolescents avec l’ensemble de la flotte à Bruxelles c’est à dire huit S73 et trois Fokker F VII 3m.



 Le 10 mai, à son tour la Belgique est envahie. Comme il était convenu lors de sa création, la Sabena met à la disposition du gouvernement belge ses avions et ses équipages pour évacuation vers l’Angleterre, au service du Ministère de l’Air britannique. Le S73 OO-AGX dèja à Shoreham est rejoint par cinq autres avions de ce modèle le jour même (OO-AGL, AGO, AGQ, OO-AGS et AGZ) et du  OO-AGY dépanné le 14; le dernier S73 OO-AGP  jugé irréparable ainsi que les trois vieux Fokker OO-AGH, AIG et AIH sont sabotés sur place par les mécaniciens; les deux DC 3 quittent en dernier la Belgique.  Quatre S73 et équipages sont intégrés au 271 Sqn  de la RAF à Doncaster; les deux autres et les DC3 au 24 Sqn à Hendon. Camouflés et portant les cocardes belges tout en gardant leur immatriculation civile, les avions et équipages belges accompagnés d’un navigateur anglais sont affectés au ravitaillement des troupes anglaises en France notamment à Calais, Abbeville, Merville et Paris. Malheureusement, le 23 mai est une journée dramatique pour la Sabena. Les avions du 24 Sqn reçoivent comme mission le transport de munition à Merville en France. Le DC3 OO-AUH piloté par Van Ackere, envoyé comme éclaireur, veille à ce que l’aérodrome soit sécurisé par les troupes amies; se pose sans encombre et déploie des draps pour indiquer la direction du vent aux autres avions de la formation. Au cours du déchargement deux chasseurs Messerchmitt BF109E attaquent l’aérodrome et détruisent le S73 OO-AGZ au sol . Le S73  OO-AGS décolle après l’attaque mais est il abattu et tout l’équipage est tué sauf le mécanicien. Plus tard dans la journée, le DC3 OO-AUI  touché par la FLAK est contraint de se poser en catastrophe à Arques tuant le pilote et blessant les autres membres d’équipage.



 Le 25 mai, les anglais décident de retirer leurs forces du continent. le roi Léopold III  estime que la Belgique ne peut plus espérer une aide de la Grande Bretagne et prend la décision de capituler le 28. Le gouvernement belge et la direction de la Sabena, réfugiés en France, ordonnent aux équipages de rejoindre Marseille avec leurs avions, certains pilotes préfèrent cependant rester en Angleterre afin de poursuivre le combat au sein de la RAF. Le ministre des Colonies de Vleeschouwer veut continuer la guerre à partir du Congo et le Général Tapproge, commandant en chef de l’entraînement en vol des pilotes de l’Aéronautique militaire, donne l’ordre à la flotte Sabena de rejoindre Oujda au Maroc, où se trouvent  les élèves-pilotes militaires réfugiés, pour les évacuer au Congo. Cependant les autorités belges réfugiées en France ne veulent pas contrarier le gouvernement français et mettent les avions de la Sabena à la disposition du Ministère de l’Air:  cinq S73, un DC3 et trois S83, dont le OO-AUJ  avion directement livré de l’Italie vers Marseille en janvier 1940. Ces avions assurent les transports de la France Libre et ramènent chez eux les pilotes militaires français ayant évacué leurs avions en Afrique du Nord.   

 Le 22 juin, la France dépose les armes et le nouveau gouvernement du Maréchal Pétain prend le parti de l’Allemagne et de l’Italie: le personnel de la Sabena est fait prisonnier; les avions sont tous bloqués à Alger sauf le S83 OO-AUD qui se trouve à Oran. Après discussions avec les autorités françaises, la plupart du personnel est libéré; certains rentrent en Belgique et d’autres  rejoignent le Congo. La commission d’armistice franco-italienne cède les avions belges à la Régia Aeronautica italienne. Le S73 OO-AGQ est cannibalisé sur place; les autres avions  repeints aux couleurs militaires italiennes avec nouveaux codes rejoignent Rome pour servir dans des unités de ravitaillement et de transport de troupes en Mediterrannée. Le S83 OO-AUE est accidenté quelques semaines plus tard à Tunis;  le S83 OO-AUJ à Rome en novembre et quelques jours plus tard le S73 OO-AGX s’écrase au décollage à Brindisi tuant son équipage italien et vingt quatre soldats; le S83 OO-AUD effectue un atterrissage sur le ventre à Alger. Au début 1941, il ne reste donc plus que trois S73 et le DC3. Suite au plan d’invasion en juin 1941, Mussolini forme un corps expéditionnaire italien pour combattre au coté des allemands en envoyant les trois S73 en vue de ravitailler les troupes. Envoyée au front russe en novembre 41, l’escadrille revient rapidement en Italie suite aux rigueurs de l’hiver. Après une seconde tentative en mai 1942, lors de la retraite des troupes de Stalingrad, l’unité se replie sur Bucarest et revient en Italie en mars 1943: les S73 OO-AGL et AGY sont manquants. Seul survivant le S73 OO-AGO est affecté dans une nouvelle unité de transport italienne mais suite au manque de pièces de rechange il est cloué au sol et ferraillé lors de la libération par les alliés. Quant au DC3 OO-AUH, le 26 août 1940 lors d’un vol d’essai local par un équipage italien  accompagné de pilotes belges, il met le cap sur Rome alors que les pilotes belges espéraient s’emparer de l’avion après son test pour rejoindre le Congo. Le DC3 réimmatriculé I-EMOS est mis à la disposition d’une unité militaire, créée par la compagnie aérienne italienne Ala Littoria sur la ligne Rome - Tirana le 19 sept 40 ensuite comme transport de troupes lors de la campagne de Grèce pour retourner ensuite à la compagnie aérienne.  Lufthansa qui exploite des DC3 confisqués à KLM et CSA vers les pays neutres mais dont plusieurs de ses avions sont détruits est intéressé par celui-ci. Un échange du DC3 contre dix huit avions français capturés par les allemands est convenu  le 6 août 1943.  Atterit à Berlin – Tempelhof, l’avion est repeint en noir avec cocardes allemandes et immatriculé D-ATZP. Il est utilisé la nuit pour le transports de diplomates vers les villes neutres comme Madrid, Lisbonne et Stockholm en restant opérationnel ainsi que deux autres avions de ce type à la Lufthansa jusque en mai 1945.

 Alors que la débâcle allemande se précise et qu’Hitler s’est donné la mort le 30 avril, Himmler souhaite évacuer le gouvernement vers Prague où ses troupes se sont rassemblées. Il fait mettre à sa disposition le D-ATZP qui se trouve momentanément à Stockholm pour l’amener à Flensberg en Allemagne du Nord. Par contre, le 2 mai l’amiral Doenitz souhaite terminer la guerre et donne l’ordre de mettre le DC3 à sa disposition pour le conduire ainsi que son gouvernement provisoire à Reims afin de signer la capitulation. Le 5 mai, l’aérodrome de Flensberg est pris par les troupes britanniques. L’avion est capturé et ensuite ferraillé comme la plupart des avions ennemis abandonnés sur le terrain de Flensberg.

Poursuite des activités de SABENA Afrique

 Les liaisons intérieures au Congo, non affectées par la guerre, se poursuivent normalement au début de la guerre avec six Junkers Ju52 et six Fokker F VII. Les fréquences des vols sont cependant accrues au cours des années au point que tous les chefs-lieux de province et toutes les villes de district reçoivent une liaison hebdomadaire. C’est à bord d’un JU52, 27 octobre 40, que le général de Gaulle passe à Léopoldville venant de Pointe - Noire lors du ralliement des colonies de l’A.O.F.  -  Afrique Occidentale Française à la France Combattante.



 En septembre 1940, à la demande du Ministère de l’Air britannique, des liaisons d’essais sont effectuées entre Elisabethville et le Caire via Nairobi.

 En octobre, en compensation partielle des avions saisis à Alger, deux Lockheed L14 Electra de la Régie Air Afrique qui rentraient de Madagascar à Alger sur la liaison vers la France, après avoir transporté le Gouverneur et divers fonctionnaires que le gouvernement de Vichy avait mis en place sur l’île ralliée à sa cause, sont confisqués à l’escale d’Elisabethville par le gouvernement du Congo belge et mis à la disposition de la Sabena.  Un accord intervient avec les autorités françaises de Dakar pour l’échange des équipages des deux L14 contre les derniers membres du personnel Sabena à Alger: un ingénieur, deux pilotes et un mécanicien. Cet échange a lieu le 15 février 1941 à la frontière nord du Nigéria sur la route de Zinder à Kano.

 L’exploitation régulière et hebdomadaire de la ligne du Caire débute en fin d’année 40 suivant le trajet suivant: le tronçon Stanleyville – Takoradi est effectué en JU52 et celui de Stanleyville- Le Caire en Lockheed L14. Plus tard, la ligne devient bihebdomadaire avec départ de Takoradi vers Juba donnant correspondance aux hydravions de BOAC -British Overseas Airways Corporation. Ensuite, l’un des services est prolongé jusqu’ à Karthoum  et enfin les deux sont étendus jusqu’au Caire.

  Le 17 mars 1941, à la demande du Gouvernement Général, le siège social de la compagnie aérienne est transféré à Léopoldville. En juin, la ligne tant convoitée avant – guerre, par la compagnie belge, qui relie Léopoldville via Stanleyville au Cap en Afrique du sud passant par les Rhodésies et Johannesburg est enfin réalisée d’abord en JU52 puis en Lockheed. Deux Lockheed L18 et des pièces de rechange destinés à Air Afrique bloqués sur les quais du port de New-York sont rachetés au Gouvernement de Vichy pour remplacer une partie des Fokker à bout de souffle; ils sont rejoints par cinq autres exemplaires version C60A en 1943 alloués par l’administration de guerre américaine car les DC3 souhaités sont réservés à l’armée. Deux vieux JU52 stationnés à Lagos, ex avions de transport de la compagnie aérienne suédoise ABA utilisés comme transport de nuit par BOAC sont rachetés l’année suivante, l’un d’entre - eux sert de pièces de rechange. Une commande est cependant passée aux États Unis par le direction de Sabena Europe réfugiée à Léopoldville concernant la livraison de six DC3 de vingt et une places pour remplacer les JU52 et une prise de rang en 1944 pour  livraison de plusieurs DC4, tous ces avions livrables lorsque la guerre est terminée. 

 Une nouvelle ligne stratégique pour le gouvernement anglais s’ajoute dès octobre 1942 en reliant Léopoldville à Lagos via Pointe Noire (Congo Brazzaville), Libreville (Gabon) et Douala (Cameroun). Des avions arrivent en caisse dans le port de Takoradi en Cote de l’Or , sont montés sur place et ensuite convoyés en vol sur toute la largeur du continent.  Pour cette raison pendant plus de quatre ans, la Sabena transporte de façon bihebdomadaires des troupes, du personnel de la RAF,  des armes et munitions sur la route reliant la Cote de l’Or (Ghana) au Caire via Takoradi et Acra (Cote de l’Or) - Lagos (Nigeria)  – Douala  (Cameroun) – Bangui (AEF) – Libenge – Stanleyville – Entebbe (Ouganda) – Kisumu (Kenyia) – Juba, Malakal, Karthoum et Wadi Halfa (Soudan). De nombreux vols spéciaux sont également organisés au cours des années de guerre, principalement au bénéfice des forces belges engagées en Abyssinie en 1941; de la colonie belge en Palestine en 1942 lors de l’avancée menaçante des troupes allemandes; de la France combattante à Alger en 1943; ensuite à Madagascar ainsi qu’en Afrique Équatoriale Française; au Gabon; au Cameroun; en Ouganda; au Tanganyka; au Kenya; en Rhodésie et en Afrique du sud.

 Quelques accidents sont à déplorer au cours de ces années mais sans faire de victimes: le JU 52 OO-AUG, aux environs de Bangui, le 2 janvier 1943; un autre JU52 OO-AGU, près de Costermanville, le 25 mars; le Fokker  FVII OO-AIP, le 31 mai et le JU 52 OO-AUF, le 3 avril 1944, à Mongana au Congo belge. 

 Avec un personnel réduit et hétérogène de différentes nationalités, il faut réaliser des exploits  pour maintenir les avions en état de vol car le manque de pièces de rechange est dramatique: par exemple, des Fokker FV II sont équipés de trains d’atterrissage de S83 récupérés en Abyssinie et suite au manque de pneus aux standards allemands pour les JU52, il faut couler des roues en utilisant le dural d’hélices récupérées dans les dépôts capturés aux allemands afin de réaliser des jantes capables d’accepter des pneus d’origine américaine.

Le réseau de la Sabena de 5500 km au début de la guerre atteint 32000 km en 1944.
      

 

	SN	SN	RAF	RAF	VICHY	AER.MIL.IT
	09/05/40	10/05/40	12/05/40	23/05/40	22/06/40	08-10/40	40-45
S73	OO-AGL		271 SQD		CONFISQUE	MM605-14	DET RUSSIE
	OO-AGP	BU BRU
	OO-AGO		271 SQD		CONFISQUE	MM605-15	BU 45
	OO-AGQ		271 SQD		BU
	OO-AGS		271 SQD	DET MERVILLE
	OO-AGX		24 SQD		CONFISQUE	MM605-13	DET BRINDISI
	OO-AGY		24 SQD		CONFISQUE	MM605-16	DET RUSSIE
	OO-AGZ		24 SQD	DET MERVILLE
S83	OO-AUC						DET LEO
	OO-AUD				CONFISQUE	MM605-17	DET ALGER
	OO-AUE				CONFISQUE	MM605-18	DET TUNIS
	OO-AUJ				CONFISQUE	MM605-19	DET ROME
DC3	OO-AUH		24 SQD		CONFISQUE	MM605-20	D-AZTP BU 45
	OO-AUI		24 SQD	DET MERVILLE
F VII	OO-AGH	BU BRU
	OO-AIG	BU BRU
	OO-AIH	BU BRU

				BU :	CANNIBALISE
				DET :	DETRUIT OU	ACCIDENTE	EN VOL