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Les Ch'tis avions de Lens.

Serge Nemry - Janvier 2016


 80.000 personnes annoncées par les organisateurs, plus de 100.000 selon la police ! Non, nous ne citons pas les chiffres d’une manif syndicale, d’ailleurs si cela avait été le cas, ces chiffres auraient été inversés. C’est  sur l’aérodrome de Lens, le dimanche 20 septembre 2015, à l’occasion du meeting aérien que ce grand rassemblement populaire a eu lieu.
La raison d’un tel succès ? La gratuité d’accès, des organisateurs à l’écoute, une grande proximité avec les pilotes, des zincs proches du public et des bénévoles disponibles. C’est un événement qui participe également à la renommée de la Communauté d’Agglomérations de Lens-Lievin et de ses entreprises, donc ces dernières n’hésitent pas à investir dans le sponsoring et le village VIP.

           

Répétitions et émotions.

 La matinée est réservée aux arrivées des avions à hélices (les jets sont basés à Lille) qui vont assurer soit une présentation soit une présence au show statique. L’après-midi le ballet des répétitions occupe le ciel, entrecoupé par l’atterrissage d’un visiteur ou d’un participant. Emotion, lorsque le DH-82 Tiger-Moth (Serial 84882) de Marc Jannin (Aéro-club de Bernay) se prend un coup de vent de travers lors de l’atterrissage et que l’aile et l’aileron droits caressent l’herbe mouillée de la piste ; l’avion part en léger dérapage sur la gauche, mais est magistralement redressé par son pilote. Le Tiger-Moth qui a fait un 180° s’immobilise puis, après examen du biplan, rejoint le parking. Ouf, pas de bois cassé. Le lendemain, Marc exécute une très belle présentation sur cet avion d’écolage qui a servi au sein de l’Elementary Flying Training School de la Royal Air Force. Quand sa carrière militaire se termine en décembre 1950, il passe dans les mains de nombreux propriétaires avant d’atterrir à l’Aéro-club de Bernay en 2000, sous l’immatriculation F-AZEI.

   

 Mon guide du jour, Stéphane, pilote à l’Aéro-club de Lens, m’emmène à la rencontre des pilotes et des avions dans la zone de parking, non accessible librement pour des raisons évidentes de sécurité. Il me conduit au bout de la 03-21, à l’opposé des terrils, où trône le superbe Dakota aux couleurs d’Air France. Là, les bénévoles de France DC-3 ont entamé un dépannage marathon. Arrivé la veille, le Dak’’ F-BBBE’’ a subit une crevaison du pneu droit qui se dégonfle lentement mais sûrement : impossible de manœuvrer et d’assurer les vols prévus, il faut réparer. Mais voilà, l’avion se trouve sur un parking en herbe bien mouillé par les pluies des jours précédents et l’équipage ne dispose pas de tout le matériel nécessaire. Qu’à cela ne tienne, une fourgonnette quitte Paris tôt le lendemain matin et fait route vers l’aérodrome avec des renforts et  de l’outillage. Sur place, il faut d’abord consolider l’assise avec des plaques de métal et de bois de manière à pouvoir installer deux crics et soulever méticuleusement, par petits coups, chaque branche de la fourche du train. La stabilisation se fait au fur et à mesure avec des cales de bois de différentes épaisseurs : un travail  délicat, éprouvant pour les nerfs, qui va prendre plusieurs heures. De la persévérance il en a fallu ; deux essais et plusieurs coups de pompes aux crics, millimètre par millimètre, pour aligner les branches de la fourche, ont été nécessaires avant de pouvoir  y glisser la nouvelle roue. L’axe placé dans les mâchoires, il ne restait ‘’plus qu’à’’ resserrer les différents boulons, une opération pas si évidente que cela et qui nécessita quelques coups de maillet. Quelque 6 heures après le début des travaux, le DC-3 reposait à nouveau sur son train d’atterrissage. En fin d’après-midi,  la mise en route des moteurs suivie du roulage et du décollage étaient la plus belle récompense offerte à toute l’équipe de bénévoles de France DC-3. Good show !

               

Escorte ‘’Rafale’’ pour ‘’Paris’’.

Quand Jean-Michel Laporte, pilote, président d’Armor Aéro Passion (Morlaix-Ploujean), lève la tête puis pointe sa caméra vers l’horizon, c’est qu’il y a du ‘’Paris’’ pas loin. Coup d’œil dans la même direction pour voir apparaître deux Rafale marine, crosses d’appontage sorties, escortant le Morane Saulnier MS-760 Paris appartenant à l’association. Quelques passages à trois, puis la formation se disloque pour laisser, durant quelques minutes, le pilote du Morane montrer les performances et la maniabilité de ce quadriplace de liaison rapide qui a équipé l’Armée de l’Air et la Marine. Le petit jet s’efface dans le ciel et cède la place aux Rafale M des ‘’ Furieux’’ de la 11F qui reviennent sur le site dans le rugissement des réacteurs Atar M 88-2. Quinze tonnes de poussée par avion, cela déchire ! Évolutions à basse vitesse, manœuvres post combustion allumée et, surprise, avec le 32 qui surgit de derrière le hangar pour un passage ‘’tout’’ sorti, un allumage de la réchauffe et une chandelle.


     

Coup de cœur…

 Fidèles à une belle tradition, de nombreux enfants défavorisés déambulaient sur le site et partaient à la découverte des différentes expositions, des stands, et des avions. Un emplacement VIP affrété par Buffalo Grill leur offrait un goûter tout en chocolat ainsi qu’un sac empli de petits cadeaux. Une belle occasion pour bon nombre de pilotes de venir à la rencontre de ces enfants et de montrer qu’eux aussi ont un cœur grand, comme celui dessiné dans le ciel par la Patrouille de France. Tao et son équipe Rafale solo display étaient leurs stars, talonnés par Karim, animateur du bus podium de l’Armée de l’Air. De plus, c’est aux premières loges que ces enfants ont, durant tout l’après-midi, assisté aux répétitions. Bravo à l’Association Fêtes de l’Air et à Buffalo Grill ainsi qu’aux bénévoles pour cette généreuse initiative.

   

Show crépusculaire.

 Quelque peu nuageux durant la journée, le temps s’améliore nettement à l’heure du show crépusculaire (Sunset) ouvert par le Capitaine Benoit ‘’Tao ‘’Planche sur le Rafale C décoré ‘’Tiger’’. Le ciel se pare de bleu et lentement le soleil descend se coucher, face au public. Tao profite de cette belle lumière pour montrer aux 4.000 invités une partie du domaine de vol du fleuron de l’Armée de l’Air. Le Capitaine Planche, instructeur au sein de l’Escadron de Transformation 2/92 Aquitaine de St-Dizier (BA-113), totalise plus de 2.800 heures de vol, dont quelques 1.500 sur Rafale; il effectuait en 2015 sa dernière saison de ‘’Tator’’.

     

Succédant au chasseur de Dassault, la Patrouille de France, fumigène ‘’on’’, a décoré la voûte céleste des couleurs nationales. Une solide mise en bouche avant la présentation du lendemain.
 Les dernières volutes de fumée à peine dissipées, c’est le Commandant Aviateur Tom ‘’Gizmo’’ De Moortel qui, avec son F-16, vient jouer dans les prémices du crépuscule. Un  Solo Display F-16 fortement appréciée à entendre les ‘oooh’ et les ‘wouawww’ des spectateurs, plus encore quand ces manœuvres sont ponctuées de tirs de ‘flares’. Gizmo, pilote d’expérience, est officier de sécurité aérienne à Kleine-Brogel et fait partie de la 31ème Escadrille ‘’Tiger’’. Seul bémol à cette belle prestation est qu’il avait laissé sur la base limbourgeoise son ‘’Blizzard’’, le Fighting-Falcon spécialement décoré pour le Solo Display. A Lens, il volait sur le F-16AM, FA-136, ’’the little last one’’ comme il était appelé lors de sa livraison en septembre 1991.

       

 Belge toujours, en provenance du 1er Wing de Beauvechain cette fois, le Démo Team Agusta A-109 avec aux commandes le Capitaine Aviateur Filip ‘’Shaggy’’ Peremans et le Capitaine Aviateur Kevin ‘’Que20’’ Beckers. Ici encore la présentation est accentuée par des tirs de flares qui sont autant d’étoiles filantes dans un ciel qui passe graduellement de bleu à orange. Malheureusement, comme pour le F-16, l’A-109 ‘’Griffon’’ spécialement décoré est resté blotti dans son hangar à KB.

   

 Réputé pour ces évolutions au ‘’sunset’’, le Twister Aerobatic Team avec deux monoplaces Silence SA1100 Twister a empli le ciel de paillettes étincelantes; cette patrouille anglaise est une grande spécialiste des démonstrations avec effets pyrotechniques, véritables feux d’artifices volants.
 Un ballet gracieux piloté par Guy Westgate sur planeur MDM-1 du Glider FX Display Team, et la démonstration de la patrouille des  Cartouche Doré sur TB-30 Epsilon étaient également au programme de ce début de soirée qui s’est clôturé par un grand feu d’artifice dont nos oreilles se souviennent encore. Après un excellent dîner avec les organisateurs et des équipages très en forme à l’instar des Rafale et F-16,  vite…  un dernier verre au Hurricane Bar, et direction l’hôtel pour quelques heures de repos.

   

Dimanche, la grande messe.

 Dès le petit jour, le soleil baigne l’aérodrome qui accueille ses premiers spectateurs à l’heure du café et des croissants. Le programme, bien qu’amputé des démonstrations du Rafale et du F-16 partis conquérir le ciel de Sanicole (Belgique) et orphelin de The Great War Display Team qui pour raison météorologique ( ?) n’a pas traversé la Manche, restait cependant attrayant. Tao et son équipier (avion de réserve) ont, à 9h15, avant de mettre le cap sur Kleine-Brogel, ouvert le ballet aérien par quelques passages bas et rapides.

       

 Dans les allées, de nombreux stands s'ouvrent aux visiteurs. Durant cette après-midi aéromagique, le public ‘’en a vu de toutes les couleurs’’ avec dans le désordre :
 Les paras du Centre École Régionale de Parachutisme de Lens et leurs sauts, dont certains en tandem, depuis le Pilatus PC6 Porter basé sur l’aérodrome local. Un (bel) avion qui vient d’être complètement remis à neuf et inauguré comme il se doit.

   

 Grâce et finesse avec les acrobaties du Marganski & Myslowski MDM-1 Fox de Glider Fix (Swift Aérobatic) ponctuées de fumigènes orange.

   

 Passant de +9 à -9g, Pascale Alajouanine, cinq fois championne de France, deux fois d’Europe et championne du monde par équipe réalise une démonstration époustouflante sur son CAP 232. Pascale vole à 350km/h dans un cube virtuel de 1.000 mètres sur 1.000 et effectue une rotation complète en 85 centièmes de seconde sur cet avion construit en fibre de carbone. Marraine du Meeting de Lens, Pascale est reconnue en France comme athlète de haut niveau ; elle est l’épouse de Régis Alajouanine, fondateur de l’AVA (Amicale de Voltige Aérienne), pépinière de grands champions et de grandes championnes dans cette discipline extrêmement exigeante.

     

 Une belle réplique du Nieuport Ni28, construite et volée par Thierry Roussel (Kit d’assemblage fourni par Airdrome Aéroplanes USA ) et équipée d’un moteur Rotec (Australie) de 110 ch (82 Kw)  L’avion, opéré depuis Micheville, est aux couleurs du 95th Aéro Squadron, US Army, première escadrille américaine de ‘’chasseur’’ engagée en France.

     

 Au décollage, le Marchetti SF-260 camouflé de la jeune entreprise OUI’UP, spécialisée dans le ‘’skywriting’’.Envie de déclarer votre amour ou tout simplement envie de faire un beau coup de pub : OUI’UP dessine dans le ciel et rend votre message unique. Cette fois il a  tracé dans le ciel les lettres LOOS, pour marquer la commémoration de la bataille éponyme (www.ouiup.fr).

 

 Les deux Robinson R-22 de Tango Bleu prennent position et entament une chorégraphie aérienne réglée par une professionnelle de la danse, Claire Van Vlamertynghe, sur une musique composée par Denis Verdier. Thierry Basset, leader, et son ailier Koy Sakuna Kok sont les pilotes de ce duo hors norme, tous deux champions dans la discipline.Les Swip en vol inversé

   

 En bleu et jaune pour l’un, en vert et jaune tigré pour l’autre,  les deux Boeing PT17 Stearman des Sierra Whisky entrent en action, laissant derrière eux une belle traînée de fumigène blanc. François Forget, ancien démonstrateur sur Mirage 2000, vole l’US NAVY  tandis que Jean-Marc Viard de l’Association Aéro Rétro est aux commandes du Tiger. Un duo éclatant sur fond de ciel bleu.

   

 Charlie’s Heavy, le TBM Avenger (M parce que construit par General Motors – F=construction Grumman), propriété du Suisse Charles Trachsel, démarre son puissant Wright Cyclone. Les 1.900ch. développés par ce moteur en étoile se font entendre sur le plateau de Bénifontaine. Le bombardier - torpilleur est le premier avion dont les ailes pouvaient se replier pour gagner de la place sur les porte-avions. L’appareil présenté porte l’uniforme de l’US NAVY.

   

 La patrouille des Piper de Saint-Dizier sont toujours dans le coup et sont des participants réguliers à Lens pour le plus grand plaisir des spectateurs. Le J3 aux couleurs du débarquement, piloté par Jean-Louis Marcireau et le PA19 en tenue de vol ‘’US ARMY’’ avec au stick,Gilles ‘’Sam’’ Vallée, pilote de chasse à l’Armée de l’Air depuis 1991.

 

 En uniforme bleu blanc rouge, les huit AJets de la Patrouille de France ont scintillé sous le soleil automnal. Tantôt avec, tantôt sans l’appui des fumigènes, les pilotes ont offert à un public conquis une véritable chorégraphie aérienne alternant les figures, les ‘’percussions’’ (croisements) à deux ou quatre avions  et les présentations en ‘’solo’’. Un grand spectacle aérien, digne de sa réputation internationale ; au sol, les spectateurs émerveillés ont hurlé leur satisfaction.

       

 On pouvait également admirer un superbe show du bien connu Swip team britannique qui évolue en un duo coloré très serré.

   

 Les autogires ELA  de l’école de pilotage ULM, aéro Nord, ont démontré toutes les capacités de ces ULM à voilure tournante.


 Le Mudry Cap 10b de l’Aéro Club de la Lys et de l’Artois dans sa livrée originale rouge et jaune à pois est visible de loin. Basé à Lens, le North American AT-6D, avion d’entraînement de plusieurs générations de pilotes de chasse, appartient à l’association Les Ch’tis avionneux. Le Spitfire, tout en bois, rénové patiemment et méticuleusement par une équipe de passionnés, a effectué sa première présentation publique. Il a été peint aux couleurs de l’as polonais Stanislaw Skalski  DSO, DFC & 2 bar, du Polish Fighter Team, tel que lors de la campagne de Tunisie.

     

 Un meeting aérien sous le regard protecteur de la gendarmerie Nationale sur Ecureuil EC 135 venu du centre de formations aériennes d’Amiens-Glisy.




 Mes remerciements à Régis Grébent, le magicien local, et à son équipe, à Stéphane mon guide sur la place verte, à Hervé Portenseigne, réserviste de l’Armée de l’Air, mais débordant d’activités, ainsi qu’à tous les bénévoles plus sympas les uns que les autres.
Au revoir et merci, le rendez-vous est pris pour 2017.