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Meeting de l’Air 2014, Nancy-Ochey

La pluie n’arrête pas les aviateurs…

 Samedi 5 juillet autoroute A 31, Jean-François, Michel et moi roulons en direction de Nancy et de sa Base de bombardiers d’eau ! Euh…non,…erreur : nous dirigeons vers le seul aérodrome où sont stationnés des Mirage 2000D. Désolé, une perturbation momentanée de l’esprit probablement due à la quantité de ‘’flotte’’ qui nous tombe dessus. Notre target du jour, la Base Aérienne BA133 de Nancy-Ochey, se trouve dans le département de Meurthe-et-Moselle en région Lorraine. Ce week-end s’y déroule un grand Meeting de l’Air, organisé par le FOSA (Fondation des Oeuvres Sociales de l’Armée de l’Air), avec pour thèmes : les 80 ans de l’Armée de l’Air et le 100ème anniversaire de la première mission de bombardement. Vous l’aurez compris, il pleut et cette pluie nous poursuit, nous précède, depuis des centaines de kilomètres, l’horizon reste gris de gris et le moral est de la même couleur. A l’entrée de la BA133 Commandant Henry Jeandet, un rayon de soleil nous arrive enfin au travers des sourires généreux d’un peloton d’honneur féminin. Bon, ce n’est d’évidence pas pour nous… mais pour les autorités militaires et civiles attendues ce jour par le Colonel Louis Pena, Commandant de la base; n’empêche, elles sont vraiment sympas dans leur bel uniforme ! A peine arrivés au parking, nous sommes amicalement interceptés  par un jeune sergent, chargé de la presse pour le week-end, qui sera notre guide tout au long de la journée. Spécialiste du renseignement sur les menaces sol-air (DCA, contremesures, missiles sol-air etc…), il accompagne régulièrement le 1/3 Navarre lors de missions opérationnelles et pour cette raison il souhaite que nous ne publions ni son nom, ni sa photo. Ce sera également le cas pour quelques pilotes interviewés qui ont de nombreuses OPEX (OPérations EXtérieures) à leur actif et qui sont susceptibles d’encore partir en opérations ; la sécurité des personnels et de leurs familles est primordiale et nous respectons cette sollicitation. D’emblée, notre mentor nous annonce, qu’avec cette météo exécrable, l’Airshow va connaitre quelques perturbations dans le volet aérien de sa programmation. Alors, faisant fi des averses, nous nous dirigeons vers les différentes expositions qui s’étalent sur une grande partie de la base et certains hangars. Des dizaines de stands offrent au public insignes, maquettes, posters, casquettes, livres et autres souvenirs liés à l’aviation. Un petit bonjour au stand de nos compatriotes des Red Devils, une évaluation de la situation météo avec Grat et son équipe du F-16 Solo Display qui à ce moment-là espère toujours l’arrivée d’une éclaircie et faire voler le F-16 vers 14h00. Quelques mètres plus loin, nous voilà plongés au cœur des Mirage 2000D et de leurs expérimentés pilotes de chasse. Trois Escadrons de Combat(EC) opèrent depuis la BA133 : l’Escadron de chasse 1/3 ‘’Navarre’’, l’Escadron de chasse 2/3 ‘’Champagne’’ et l’Escadron de chasse 3/3 ‘’Ardennes’’: ils sont tous représentés par un avion portant l’insigne de l’Escadron.
     

 La formation spécifique ‘’2000D’’ des pilotes et des navigateurs officiers systèmes d’armes est assurée par l’ETD 2/7 Argonne (Escadron de Transformation sur 2000D) créé afin de libérer du temps dans les Escadrons opérationnels. Dans les espaces traditions de ces Escadrons, personnels navigants, mécanos-techniciens spécialistes et administratifs partagent le même enthousiasme à défendre les couleurs de leur unité respective dans une ambiance de saine rivalité.
 

 Nous y faisons la connaissance d’un Capitaine, pilote au 1/3 Navarre (indicatif radio ‘’Coca’’) qui  nous explique brièvement son parcours : il a, comme tous les candidats pilotes de l’Armée de l’Air, effectué son écolage  à Tours où il est macaronné (remise des ailes de pilote) puis passe par Cazaux où il entame sur Alpha Jet sa formation de base comme pilote de combat. Ses premières heures ‘’ réacteurs’’ sur le ‘’gadget’’ enregistrées dans son carnet de vol, il est, grâce à ses excellents résultats, désigné pour voler sur 2000D à Nancy. Il faut, dit-il, d’abord apprendre à voler le Mirage 2000, cela se fait à Orange (BA-115) au sein de l’Escadron 2/5 ’’Ile de France’’ où nous volons sur 2000B et C, la version du 2000 spécifiquement développée pour la défense aérienne. On vole souvent avec un avion  en configuration ‘’Fox’’ c'est-à-dire équipé d’un bidon ventral (1.300 litres) parfois plein, parfois vide...ce qui modifie les paramètres de vol. J’ai volé tous les jours durant plus de 3 mois, de manière à acquérir une parfaite maitrise de l’avion à aile delta. C’est ensuite Nancy qui prend le relais pour la formation spécifique au pilotage et aux systèmes d’armes du D. C’est une autre paire de manches, précise-t-il, et cela représente un long  parcours très complexe et très contraignant. Voler sur 2000D, c’est pouvoir voler très bas, par beau ou mauvais temps et sous la menace constante des défenses anti-aériennes ennemies. C’est également durant cette période que l’on apprend à voler en binôme, pilote/navigateur officier système d’arme (NOSA) ce qui pour le pilote  remet en question les réflexes et les décisions du vol en solo ; ici le pilote n’est plus seul maitre à bord mais doit suivre son NOSA pour la navigation et les critères de tir. En entrainement comme en missions, les nerfs sont mis à rude épreuve et il faut tenir le coup physiquement. Pilote aguerri, il a participé à 55 missions de guerre en Afghanistan, en Lybie et au Mali.
   

 En passant devant l’espace tradition du 2/3 ‘’Champagne’’, nous sommes conquis par le sourire de Laura ‘’Boulet ‘‘, Capitaine, 16ème femme pilote de l’Armée de l’Air, en formation sur 2000D. Mais pourquoi ce badge portant le surnom de ‘’Boulet’’ ? Laura explique que cet insigne spécial et pièce unique est traditionnellement porté par le dernier pilote qui a intégré l’Escadron. Elle le portera jusqu'à l’arrivée d’une nouvelle recrue qui, à son tour, devra l’arborer sur son épaule gauche avant de le passer au dernier pilote qui se présentera au 2/3 et ainsi de suite. Après un parcours identique à tous les jeunes pilotes qui intègrent l’AA., la Capitaine a reçu son brevet lors du macaronage d’avril 2012. Orientée 2000D, ce dont elle rêvait depuis son enfance, Laura rejoint le 2/3 en octobre 2013 et devient la deuxième femme au sein du ‘’Champagne’’, la première étant une NOSA ; il y a plus de femmes dans cette dernière catégorie que de femmes pilotes nous confie-t-elle. Après avoir fait connaissance avec le 2000 à Orange et appris à piloter un avion à aile delta doté de commandes  de vol électriques, Laura revient à Nancy. Durant 2 mois c’est l’ETD 2/7 qui prend en charge le stagiaire pour la transfo sur 2000D.  Obtenir sa qualification sur 2000D est un enjeu très difficile et ce n’est pas gagné d’avance. A ce stade, nous dit-elle, je suis ‘’condé’’ 80 - condé étant notre indicatif radio et 80 signifiant que je suis pilote à l’instruction (PI).Si mon parcours se poursuit avec succès, je passerai PO (pilote opérationnel). Ensuite l’entrainement permanent et l’expérience acquise mènent vers les qualifications élevées de SCP - sous-chef de patrouille et CP - chef de patrouille. L’entrainement que nous suivons est très dense et soutenu ; après avoir obtenu en 6 semaines la qualification sur  2000D,  le 2/3 prend le relais. Il faut durant des mois s’entrainer à tous les panels de missions dévolues à notre unité, connaitre toutes les particularités du D et assimiler les systèmes d’armes. Les missions deviennent progressivement de plus en plus complexes et la gestion de plus en plus difficile, avec notamment la gestion du L16, le système de liaison de données tactiques de l’OTAN. Nous travaillons également beaucoup sur simulateur Nous sommes constamment évalués et cotés. Il en va de même pour le/la NOSA qui est aussi jeune que son pilote. Il arrive que certains abandonnent devant la tâche ardue et la mise à rude épreuve des nerfs, les instructeurs ne passent rien au bleu. D’autres échouent à différentes étapes de la progression. Ils seront redirigés vers une fonction de NOSA ou passeront sur un autre type d’avion. La manière dont Laura parle du Mirage 2000D ne laisse aucun doute sur sa motivation et ses chances de réussite. Manny happy landings Laura.
Nous poursuivons notre ballade parmi les différents emplacements répartis dans un grand hangar, ce qui nous met au sec pour quelques temps. 21 22 23 Uniformes, collections d’insignes, bandes dessinées, aéromodélisme, expositions historiques, hommages aux grands as français et aux Escadrilles mythiques, peintres de l’air sont autant de facettes aéronautiques à découvrir.
   

 Deux stands occupent une grande surface et attirent l’attention : celui qui expose plusieurs centaines d’insignes en tissu (badges) dont une grande partie consacrée aux ‘’Tiger’’ et celui du FFW01 Mudmovers, une escadrille virtuelle de pilotes de chasse sur F-16 Fighting Falcon, fondée par ‘’Ghostrider’’ lui-même ancien du F-16. Devant des badges tant appréciés des collectionneurs, trône un mannequin portant une tenue de vol particulièrement tigrée appartenant à Denis Mercier, ‘’Damned’’ de son surnom, à l’époque pilote au 1/12 Cambrésis, aujourd’hui patron de l’Armée de l’Air. Les pilotes virtuels des Mudmovers organisent sur simulateur des missions de combats de 6 à 12 avions, avec différentes configurations d’armements. Ces missions d’un réalisme époustouflant se font en réseaux et en temps réel ;  à découvrir sur www.ffw01.fr. Hasard des rencontres, nous croisons le Général d’Armée Aérienne Denis Mercier, Chef d’Etat-major de l’Armée de l’Air (CEMAA), accompagné du Général Bertrand Mact-Radoux, Chef d’Etat-major de l’Armée de Terre et du Colonel Pena (Cdt. Base de Nancy), en conversation avec l’auteur du magnifique livre LA GUERRE VUE DU CIEL(*), le Lieutenant-colonel Marc ‘’Claudia’’ Scheffler, Marco pour ses collègues pilotes, ancien du 2/3.
         

 Le Général Mercier, excellent public relation improvisé, me conseille la lecture de ce bouquin que l’on ne quitte plus, une fois les premières pages entamées, affirme-t-il. Une belle dédicace accordée par l’auteur et me voilà riche d’un volume de 460 pages qui relate avec beaucoup de détails une partie de la carrière opérationnelle de cet ancien de Nancy et ses multiples missions de guerre. La présence du patron de l’Armée de Terre à ce meeting aérien n’est pas anodine : il a remis aux Colonels Frédéric Chiffot, pilote, et José Souvignet, navigateur, une pièce de leur Mirage 2000, récupérée dans les Balkans, là où l’avion fut abattu par un missile sol-air en août 1995. L’équipage fut fait prisonnier par les Serbes et libéré en décembre 95, après 104 jours de captivité. Ce sont les troupes terrestres dirigées par le Colonel Mact-Radoux (Commandant le bataillon d’infanterie n° 2 de l’IFOR) qui ont à l’époque retrouvé l’aéronef. Avant  de quitter ce hangar ou plutôt cette caverne d’Ali Baba version aéronautique, une halte s’impose au stand Mirage F-1 tenu par ‘’Meche’’ et ‘’Pacom’’ : ils sont fiers de parler de leur avion qui a fait les belles heures de la reconnaissance aérienne et de la chasse. Pour eux et leurs collègues, ce week-end revêt une saveur particulière teintée de tristesse et il en va de même pour les fans du Mirage à aile en flèche : les ‘’Carol Hotel’’, patrouille éphémère sur F-1, vont effectuer leurs deux dernières représentations avec aux commandes des numéros 660 (F-1CR) et 592 (F-1B) :‘’Cox’’ (ailier) et Zyva (leader).
   

 Au 2/33 ‘’Savoie’’,Milfs est le petit dernier qui a rejoint l’Escadron ; il totalise un peu plus de 300 heures sur cet avion qui a sillonné de nombreux espaces aériens dans le monde et fait le bonheur des spotters et des fans d’aviation. Juste à coté, le simulateur F-1 attire de nombreux jeunes qui un jour peut-être embrasseront une carrière au sein de l’AA.
Nous quittons notre abri provisoire pour nous diriger vers la plateforme opérationnelle où nous allons enfin humer l’odeur de kéro et vibrer aux sons des réacteurs et des moteurs à pistons. Un passage par le bureau des opérations, qui jouxte le tarmac, où le Lieutenant-colonel Mikael Kador, chef des opérations, nous donne l’autorisation indispensable pour circuler dans cette zone fort surveillée où des avions sont constamment en mouvements. Il vaut mieux montrer patte blanche !
     

 Nous voilà au plus près des machines, des pilotes et des mécanos : que du bonheur. On en oublie presque que le ciel pleure toujours comme en atteste cette photo prise tout au début de la ligne. Follow me…
   

 Pour ce superbe Cessna 195A Business liner, pas de métal hurlant mais bien du métal poli qui scintille dès qu’il est touché par un rare rayon de soleil qui perce de temps en temps et brièvement la couche nuageuse. Le F-AYTX ‘’Coca-Cola’’ appartient à Bruno Chauvet de Foug’Air Association et est basé à Châteauroux-Villers (France).
 

Un Rockwell OV-10B  Bronco se pose et est pris en charge par un pistard dans la zone de parking avion. A bord de cet appareil, Alain Bes, pilote et Président de l’Amicale des Avions Anciens de la Drôme (Musée de l’Aviation de Chasse de Montélimar), qui arbore sur son tableau de bord une peluche ‘’Diable Rouge’’, clin d’œil aux pilotes du team belge des Red Devils et/ou…marque de soutien à l’équipe nationale de foot éponyme quelques heures avant d’affronter l’Argentine ? Le turbo-prop  mis en service en 1971 en Allemagne  est aujourd’hui présenté dans le camouflage d’un OV-10 des US Marines Corps. Alain Bes est accompagné pour ce déplacement par le jeune Romain Gonnon, mécano bénévole.
       

Souvenir de la ‘’Grande Guerre’’,  ce Nieuport Ni28 est une réplique à l’échelle réelle piloté par son propriétaire, Thierry Roussel. Cet avion, fabriqué par Airdrome Aéroplane (Holden) USA, est lui aussi disponible en kit sur commande. Celui-ci est revêtu de la tenue colorée qu’arboraient les appareils  de l’American Expeditionary Force (AEF) opérant depuis la France. C’est sur Ni28 qu’Alan Wilson et Douglas Campbell ont obtenu les premières victoires américaines en avril 1918. Eddie Rickenbacker, célèbre as américain aux 26 victoires a également volé sur ce type d’avion. A Nancy, le Nieuport 28 de Thierry Roussel est le premier à profiter d’une amélioration de la météo ; à 14h30 il se lance à l’assaut du ciel, son ennemi du jour étant le vent qui balaie l’aérodrome.
Les Red Devils belges emboitent le pas au biplan avec leurs Marchetti rouges qui se dirigent vers la piste à la queue leu leu. Paolo, Davy, Mac et Reggio colorent enfin ce ciel uniformément gris et effectuent une présentation très appréciée du public.
     
Sur le tarmac les mécanos patientent avant de prendre en charge les avions qui, prestation terminée, taxient vers la zone ops. Pour les Red Devils, le show se passe également au sol : après avoir longé les hangars dans un alignement ‘’au cordeau’’, ils effectuent un premier quart de tour ‘’en formation’’, puis un second qui les amène face à leurs emplacements parking. Dans un ensemble parfait et millimétré, ils s’avancent, moteurs au ralenti, pour s’arrêter pile au signal du leader. Good show ! Peu avant 18h00, les belges, le visage barré du drapeau national, rejoignent un local du 2/3 ou ils vont pouvoir suivre le match de foot Belgique-Argentine.
           

De l’autre coté de la zone ops, là où sont alignés les jets, le Commandant Renaud ‘’Grat’’ Thys et le Capitaine Jeroen’’Schlik’’ Dickens, respectivement solos display F-16, belge et néerlandais, attendent des instructions de la tour de contrôle. Comme le programme a été fort chamboulé depuis le matin, les deux pilotes n’ont pas encore reçu confirmation d’un créneau horaire pour décoller. Grat décide de grimper dans son cockpit et d’appeler la tour. Après une longue discussion, le verdict tombe : les F-16 restent au sol ce samedi après-midi. La déception est là, d’autant que Grat nous confie que les conditions sont suffisantes pour pouvoir présenter le show mauvais temps, essentiellement constitué d’évolutions à plat. Les équipes techniques sécurisent les deux Fighting Falcon, rangent les équipements et rejoignent leurs stands promotionnels où la bonne humeur reste de mise.
         

Quelques privilégiés se voient offrir un petit tour en EC 725 CARACAL, un hélicoptère dédié aux missions RESCO (Reconnaissances et Opérations de Sauvetage au Combat).  L’appareil, ravitaillable en vol, appartient au EH 1/67 Pyrénées basé à Cazaux. Le CARACAL, du nom de ce petit félidé de la famille des lynx, représente l’ultime évolution de la version de l’AS532 COUGAR. Doté des dernières technologies, l’EC 725, également appelé HUS (Hélicoptère pour Unité Spéciale), est équipé de nombreux détecteurs d’alertes radar, missiles, possède une caméra thermique haute définition avec télémètre laser et est armé de  deux mitrailleuses FN MAG 58 de 7,62 mm placées en sabord. Dans le cockpit, l’interface homme/machine a été optimisée de manière à assister au maximum l’équipage lors de missions difficiles. Un système PLS, Personal Locating System, permet au moyen de transmissions cryptées de localiser en toute sécurité les équipages tombés en zone hostile. Une ‘’bête de guerre’’, indispensable dans le contexte des conflits actuels, qui, de l’avis des utilisateurs, s’avère nettement supérieure au NH-90 pourtant plus récent.
     

 Dans une autre dimension, un Mosquito, un Spitfire et un P-51 Mustang à l’échelle ¾. Le Mosquito a été construit de toutes pièces par une bande de copains, pilotes retraités rassemblés au sein de Reconstructions- Répliques- Avions Anciens (RRAA). Ils ont œuvrés plus de 33.000 heures pendant 17 années pour mener à bien ce projet entamé en 1995 sous la houlette de Michel Bogaert. L’appareil a été peint aux couleurs du  NE-K (PZ-460) du Lieutenant-colonel Max Guedj, Forces Aériennes Françaises Libres (FAFL) 143 Squadron Royal Air Force. Un bel hommage à ce héros tombé en mission le 15 janvier 1945. Le premier vol début 2011 concrétisait le grand défi technique et humain que s’étaient lancé ces passionnés un peu fous.
     

 Surprise quand nous voyons arriver, moustache au vent, le Colonel de réserve en retraite Jack Krine, jeune pilote septuagénaire toujours aussi assoiffé des choses de l’air. Jack va voler le Mosquito avec son copain Bichon, pour une présentation tout en finesse. Jack Krine est devenu pilote de chasse en 1965 et a intégré la Patrouille de France en 1976 comme solo. L’année suivante, il reçoit le commandement de la Patrouille qui évolue sur Fouga Magister. Il quitte l’armée en 1978 pour rejoindre l’aviation civile et plus particulièrement Air Inter puis Air France. Jack Krine a volé sur 42 types d’avions durant sa carrière …qui n’est pas terminée ! T-6, T-33, Fouga, Mystère IV, Super Mystère, Mirage III et Mirage F-1 sont les appareils qu’il pilote durant sa carrière militaire. Coté civil, il passe du Fokker F-27 à l’A-330 en passant par le Mercure, la Caravelle et d’autres types d’Airbus. Passionné, enragé, persévérant, il vole aussi sur un nombre impressionnant d’avions de collection, reprend l’acrobatie avec la Patrouille privée Tranchant (Fouga Magister), intègre la Confederate Air Force aux Etats-Unis et prend régulièrement le manche pour l’Amicale Jean-Baptiste Salis. Rien ne l’arrête dès qu’il s’agit de s’envoyer en l’air et pourtant il a connu quatre crashs.
     

 Le P-51 Mustang, ’’Millie G’’ du Lieutenant-colonel E.B. Giller, 343 Squadron, USAF, est lui aussi issu d’un kit américain, échelle 3/4. Pourquoi construire ces avions mythiques à cette échelle ? Acquérir un vrai (rare) et le restaurer coûte une fortune et reste réservé à de (très) riches collectionneurs. En reconstruire à l’identique engendre des droits assez onéreux et la mise en œuvre d’outils de fabrication coûteux. Les fous de warbirds se tournent donc vers ces kits ‘’prêts à monter’’ fabriqués aux USA.
 

 Enregistré comme F-PFAF  L, le L étant ajouté après à la codification officielle pour représenter les  Forces Aériennes Françaises Libres, ce Spitfire est un Mark 26 construit par Supermarine Aircraft LLC au Texas. Cette réplique ¾ a été mise au point par Mike Sullivan dans les années 90 qui a repris la numérotation des Spits là où elle s’est arrêtée après la guerre. Ce Mark 26 est basé à Les Mureaux.
Représentant l’Ecole de Voltige de l’Armée de l’Air, le Capitaine Alexandre Orlowski  s’est joué des nuages et a démontré qu’il méritait amplement la médaille de bronze obtenue aux championnats de France, catégorie Elite.
 

 France‘s Flying Warbirds est venu à Nancy avec ce Yak 3 aux couleurs du Normandie-Niemen (Neu-Neu) et à l’immatriculation explicite : F-AZNN, NN pour Neu-Neu. A l’origine -Yak 11 ‘’Moose’’-, il faisait partie d’un lot de 41 machines, désarmées et stockées dans une région désertique, rachetées au gouvernement égyptien (quasi tous les Yak qui volent en Europe proviennent de ce lot). Pierre Dague et les ateliers de Jean Salis ont transformé ce Yak biplace en monoplace (pour gagner du poids et de la stabilité). Une modification qui a nécessité quelques 3.500 heures de boulot en 3 ans. Le moteur, un Shvetson ASh-21, développe 760Cv à 2.300 tours/ minute. Après le décès de Pierre Dague lors du crash de son T-28 (1991), l’avion est racheté en 2000 par Georges Perez et est basé à Melun-Réau. A noter en dessous du cockpit l’annotation : PIERRE’’S’’TROÏKA…
   

 A l’heure du gouter, les Carol Hotel prennent leur envol pour une avant dernière présentation technique.Cox et Riva mettent le paquet malgré un ciel qui reste chargé. Demain, ce sera la der des ders, avant des adieux en grande pompe le 14 juillet au dessus des Champs Elysés.Une belle page de l’histoire de l’Armée de l’Air va se refermer.
               

 La Patrouille de France profite d’une embellie et décolle pour une présentation limitée, le plafond nuageux étant trop bas pour assurer les figures prévues par beau temps. Après le débriefing d’usage, les pilotes en parfaits publics relations de l’Armée de l’Air, dédicacent plaquette et posters et n’hésitent pas à aller à la rencontre du public pour parler de leur métier.
                   

 Peu avant 16h30, de drôles de machines font leur apparition sur la plateforme : ce sont les trois ACROEZ de la patrouille civile REVA.
     
Une équipe civile mais composée de pilotes expérimentés qui tous ont fait partie de  la ‘’chasse’’ à un moment de leur carrière. Le fondateur et leader des REVA, le Lieutenant-colonel er Réal Weber totalise 5.800 heures dont plus de 4.000 sur avions de chasse. Jean-Lin Balland, pilote de ligne, a volé sur jet militaire de 1971 à 1989 et comptabilise aujourd’hui plus de 12.000 heures de vol ; chasseur devant l’éternel comme il aime le dire, il a volé sur une centaine d’appareils différents. Commandant, pilote de chasse depuis 1995, Xavier Fontaneau a 4.000 heures au compteur ; il commande l’Escadron de transformation Mirage 2000D, 2/7 Argonne, depuis 2012. Michaël Meyer, Capitaine, est entré à l’Armée  de l’Air en 1993, ses qualifications l’ont amené au Centre d’Essais en Vol (CEV) d’Istres où il est pilote d’essai expérimental ; il totalise 3100 heures de vol. Pilote de chasse depuis 2008, Kesh, le plus jeune de la bande, un peu plus de 1.000 heures de vol, est Lieutenant dans l’Armée de l’Air  et vole sur Mirage 2000. A Nancy, la mécanique est assurée par Raymond, lui aussi ancien de l’Armée de l’Air. Il a travaillé sur Skyraider- avion avec lequel il a effectué des missions au Tchad, Fouga Magister-33 ‘’T –Bird’’, Mirage III, Jaguar, Mirage F-1 et 2000. Raymond a  bien connu Paul Rorive, pilote à la Force Aérienne belge et qui présentait le Fouga Magister. Une démo qui a particulièrement impressionné le mécano des REVA, notamment le décollage du Fouga avec rentrée du train d’atterrissage au ras de la piste.
     
 L’Acroez est un biplace en tandem, de formule canard, à moteur propulsif. Cet avion est réalisé entièrement à la main sur base des plans établis par l’ingénieur américain Burt Rutan, sa vitesse de croisière est de 350 km/h, pour une consommation de 25 litres (à l’heure). Particularité observée ce jour : l’avion repose sur le nez ; le train avant n’est sorti que peu avant la mise en route du moteur. Comme pour beaucoup d’équipes de présentation, les REVA répètent au sol en mimant les différentes figures des avions avec les mains : cela donne un petit ballet étonnant que les pilotes appellent la musique.
     

Venu de Gioia del Colle, le pilote EF 2000 du 36ème Stormo  ‘’Riccardo Helmut Seidl ‘’ (12 Gruppo) montre sa parfaite maitrise du chasseur qui équipe la défense aérienne italienne. La puissance des deux turboréacteurs Eurojet EJ200  donne au Typhoon une capacité de manœuvres percutantes bien mise en valeur par le pilote. Le public a apprécié, son équipe aussi qui n’hésite pas à le rejoindre une fois les moteurs arrêtés pour des félicitations très …italiennes.
           

 La finale en décibels et fumigènes est assurée par le Capitaine Benoit ‘’Tao’’ Planche et le magnifique Rafale ‘’Thunder Tiger. Les évolutions époustouflantes de Tao, ses passages à hautes vitesses et ses manœuvres de combat émerveillent le public qui salue au retour du pilote du 02-092 Aquitaine de Saint-Dizier. Le Thunder Tiger passe tantôt dans un coin de ciel, tantôt frôle de gros nuages sombres.
           

 Dimanche, Philippe Polet a pris le relais pour Flying-Zone. Mieux loti que nous au point de vue météo, il a bénéficié, entre de nombreux passages nuageux, de quelques moments d’ensoleillement propices à de belles photos. Mais toute médaille à son revers et il s’est également ramassé une bonne ‘drache’ digne de la nationale chez nous. L’eau cela se partage…
           


 Voici le bulletin météo relevé par notre correspondant : météo sur BA 133 : temps estival prometteur jusque 10h00, puis augmentation progressive de la nébulosité…
Averse de pluie légère et ciel très nuageux avec plafond assez bas pendant le temps de midi. Le ciel chargé n’empêche pas les deux Mirage 2000D de la patrouille (temporaire) «COUTEAU CHARLIE» de faire leur démo dans la brume.
Dans l’après-midi, retour du beau temps avec un ciel principalement ensoleillé, mais aussi ambiance lourde et orageuse. Retour des nuages en fin d’après-midi .Le ciel devient très menaçant en début de soirée juste après le meeting, ma dernière photo en témoigne. Gros orage peu après.
             
     
Philippe, qui à l'œil Flying-Zone nous grat…ifie (ben oui Grat est partout…) de quelques clichés des avions qui ont participé aux démonstrations du dimanche, mais surtout des pilotes et personnels en activités au sol. Ce jour-là aussi il  fallait choisir entre un point de vue proche de la piste et de la ligne de vol ou se poster plutôt vers la plateforme ops. C’est cette deuxième option qu’a choisie notre photographe.
         


Nous remercions le Commandant Hauchamp du service presse de la BA 133 et notre accompagnateur anonyme pour leur patience et leur grande disponibilité, le Lieutenant-colonel Kador, chef des opérations, et tous les pilotes et personnels que nous avons sollicité lors de notre visite. Merci au Général Denis Mercier qui m’a fait découvrir un livre formidable et passionnant. Merci à ‘’Claudia ‘’ d’avoir couché sur papier cette carrière trépidante et pour la belle dédicace personnalisée.


(*)LA GUERRE VUE DU CIEL     Les combats d’un pilote de Mirage 2000D
     Livre écrit en collaboration avec Frédéric Lert
     Editions NIMROD, 11 Passage Saint-Pierre Amelot  75011 Paris      www.nimrod.fr