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Caravelle, SMB2 et autres avions "retraités" à Merville.

Patrick Peulmeule - Mars 2012
vue d'ensemble
 Le visiteur se rendant sur l'aérodrome de Merville Calonne (département du Nord - à 40 kms à l'ouest de Lille) ne peut manquer de remarquer, sur la partie nord de celui-ci, les silhouettes caractéristiques de plusieurs avions de transport déclassés, Caravelle, Boeing 727 ou encore Vickers Viscount. 

Ces appareils appartiennent au Centre de Formation Aéronautique Amaury de la Grange, établissement de réputation internationale créé en 1962 dont la vocation est double :
-    d'une part, il assure les formations théorique et pratique de pilote de ligne jusqu'au niveau d'embauche par les compagnies aériennes ; l'Ecole de pilotage possède à ce titre, notamment, une flotte forte d'une trentaine d'avions modernes (monomoteurs et bimoteurs) et plusieurs simulateurs de vol,
-    d'autre part, il dispense des formations de technicien en maintenance aéronautique, au sein de l'Ecole technique mise en place au milieu des années 1970.

Les avions préservés en condition statique mentionnés ci-dessus figurent en bonne place parmi les importants moyens pédagogiques dont dispose l'Ecole technique du Centre (salles de cours, laboratoire multimédia et d'examen sur ordinateurs, laboratoires d'électricité et d'avionique . . .). Ils permettent la mise en pratique des travaux sur les circuits hydrauliques et électriques, des opérations de dépannages, de dépose et repose de pièces, de réparations, des essais divers, etc

Au niveau des avions stationnés à l'extérieur, la SE-210 Caravelle 12 F-GCVK (n°276) représente l'ultime développement du mythique biréacteur moyen-courrier français. Allongée et remotorisée avec des réacteurs américains Pratt et Withney JT8D-9, pouvant embarquer jusqu'à 140 passagers (contre 85 pour la Caravelle III, la version la plus répandue), la Caravelle 12 a été construite à seulement 12 exemplaires. Le principal utilisateur de cette version a été la compagnie intérieure française Air Inter, avec 5 exemplaires commandés neufs en 1971 et 7 autres achetés d'occasion entre 1980 et 1983 à la compagnie danoise Sterling Airways (dont la 276, ex OY-SAG). La F-GCVK présente la particularité d'avoir effectué le dernier vol commercial d'une Caravelle Air Inter, se posant à Orly le 3 août 1991. Cédée par la suite à l'IAAG, elle atterrit définitivement à Merville le 25 mai 1993, non sans que l'équipage d'Air Inter ne lui ait offert trois ultimes posés-décollés . . .
   
 

Autre moyen-courrier mais de construction américaine celui-ci, le Boeing 727-228 F BOJA (c/n 19543/541) a été le tout premier des 29 appareils de ce type livré à Air France, le 24 mars 1968. Retiré du service début 1991, il arriva en vol le 18 mai de la même année à Merville, en provenance d'Orly. Souvenir personnel : l'auteur de cet article a eu le plaisir d'effectuer un beau vol d'une demi-heure à bord de ce même F-BOJA au départ de Lille-Lesquin le 1er mai 1971, dans le cadre d'opérations de promotion régulièrement organisées, à l'époque, par Air France sous le nom de "Premier vol en jet" (Caravelle ou Boeing 727). Ce type de vol était officialisé par la remise d'une attestation ad hoc en bonne et due forme aux heureux passagers y ayant participé. Le Boeing 727-228 était capable d'emporter jusqu'à 168 passagers sur 4.400 kilomètres.
   
 

Ces deux appareils, dont l'APU fonctionne toujours (APU : Auxiliary Power Unit, turbine utilisée au sol alimentant en énergie électrique et pneumatique les systèmes de bord, de conditionnement d'air et de démarrage des moteurs principaux), permettent essentiellement les travaux sur circuits et équipements électriques.

Par contre, le vénérable quadriturbopropulseur Vickers Viscount préservé sur une pelouse près de l'entrée du Centre n'a plus qu'une fonction décorative, ce qui ne l'empêche nullement de posséder un véritable intérêt historique (445 Viscount ont été construits – voir article de Luc sur le Viscount préservé à Zommelgem – Flying Zone septembre 2011). Il fut le premier appareil réformé reçu à l'époque de la création de l'Ecole technique et arriva à Merville en juillet 1975, après son retrait d'Air Inter. Il s'agit d'un modèle V724 (c/n 54), qui vola initialement à partir de 1955 pour la compagnie TCA (Trans Canada Airlines), avant d'être racheté par Air Inter en 1964 sous l'immatriculation F-BMCF. En 1980, il sera remplacé à l'instruction à Merville par une Caravelle III (cf. ci-dessous).
     

Le dernier appareil présent à l'extérieur est le Nord 2501 Noratlas n°129, démobilisé de l'Armée de l'Air française en 1987. Il n'a également maintenant plus de rôle pédagogique et se trouve désormais malheureusement en assez mauvais état externe.
     
 

Le hangar-atelier principal de l'Ecole technique abrite, entre autres matériels (visibles lors de la journée "portes ouvertes" organisée annuellement), trois avions dont la Caravelle III qui succéda en 1980 au Viscount. Cette Caravelle (n°55/F-BHRT) fut utilisée d'octobre 1960 à novembre 1979 par Air France, compagnie dont elle porte toujours la livrée d'époque, incluant le fameux hippocampe ailé grand modèle peint à l'avant des réacteurs et le nom de baptême "Picardie" (chacune des Caravelle d'Air France avait reçu le nom d'une province française). Eu égard à sa taille, il fut nécessaire d'en rogner les extrémités de la dérive et des ailes pour la persuader de pénétrer dans le hangar-atelier.
     
 

Au côté de la Caravelle III se trouve le Dassault Super Mystère B2 n°167, l'un des derniers à avoir volé dans l'Armée de l'Air, au sein de l'Escadron de Chasse 1/12 "Cambrésis" (le retrait définitif du type dans l'Armée de l'Air a eu lieu en novembre 1977 à Cambrai). Bien que les marquages de nationalité, immatriculation et insignes aient été effacés, la lettre individuelle encore portée sur la trappe de train avant et une inscription au tableau de bord attestent qu'il opéra en dernier lieu en tant que "12-YD" (F-UHYD). Malgré l'environnement de travail et l'absence de réacteur, la silhouette de ce chasseur fin et racé attire toujours autant le regard et ravive la nostalgie de l'époque à laquelle il sillonnait régulièrement, entre autres, les cieux du Nord de la France et de la Belgique voisine . . .
     
     

Caravelle III et SMB2, sont utilisés notamment pour la formation au niveau "hydraulique". Ils sont placés sur vérins, les roues ne touchant pas le sol de manière à permettre les opérations de rétraction et de sortie du train d'atterrissage.

Un Lear Jet 23 (F-BXPT) en provenance de Limoges est venu en juillet 2010 renforcer l'effectif avions dans le hangar atelier. A la même époque a été obtenu un Embraer EMB312 Tucano, type d'appareil d'entraînement retiré du service par l'armée de l'Air en juillet 2009 après une carrière de 15 ans seulement. Celui-ci, le n°468/312-JM, est arrivé par la route à Merville, revêtu de la livrée portée à l'origine (de nombreux Tucano ayant ensuite été camouflés en gris) au sein de la Division des vols 05/312 de l'Ecole de l'Air de Salon de Provence. Il est actuellement en cours de conditionnement, des instruments manquant au tableau de bord, avant emploi dans l'atelier. A noter aussi l'existence d'un Piper PA-23-250 Aztec B (c/n 27-2342), le (ex) F-BLEH.
     
 

Pour terminer, nous mentionnerons encore deux avions qui ont séjourné à Merville dans un passé déjà lointain.

En mai 1977, le Centre avait réceptionné un imposant Boeing 707-328, le F-BHSF "Château de Blois" d'Air France, en provenance directe de Roissy Charles de Gaulle. Il accomplissait alors son dernier vol après 17 ans de bons et loyaux service avec cette compagnie. Pendant de nombreuses autres années, il se rendra encore utile pour la formation des techniciens, avant d'être remplacé par la Caravelle 12 en 1993. En 1997, son état dégradé rendra sa destruction inéluctable, par mesure de sécurité.
 

Par ailleurs, le Super Mystère B2 n°167 encore utilisé actuellement n'était pas arrivé seul au Centre Amaury de la Grange à la fin des années 1970, mais accompagné d'un "frère jumeau", le n°173 ex 12-YP (F-UHYP), lui aussi en provenance de l'Escadron de Chasse 1/12 "Cambrésis" (insignes "Tigre" et "Guêpe" encore visibles à l'époque de part et d'autre de la dérive). Il a par la suite été transféré au Musée d'Hermeskeil en Allemagne, où il est exposé après avoir été repeint dans son identité originale.